[Réflexions] Carto-cringe et Représentation : les normes et injonctions aux corps (Grossophobie, Validisme, Agisme, Racisme)

Je vous retrouve pour un nouvel article réflexion, où, souvent, je tente de questionner des normes, donc des sujets ou points de vue dits « habituels » voire « majoritaires » (et encore). Cet article est en lien avec un de mes précédents, sur les stéréotypes genrés. Certains thèmes me sont devenus, au fil du temps, plus tangibles, apparaissant de plus en plus dans mon quotidien, cette familiarisation m’invitant à recalibrer mes valeurs, tout comme ma façon de voir les choses. Le thème des représentations est important – il cesse d’être personnel ou intime à partir du moment où il touche à l’identité et à la vie. Nous ne pouvons pas continuer à compartimenter, à accepter le sexisme, le racisme, les lgbtq+phobies, le validisme et l’âgisme. Ce qui est dit « politique » continue de toucher des personnes, même à la fin de la conversation. Ne pas percevoir ou comprendre ces problèmes est le marqueur d’un privilège – les biais négatifs sont donc intériorisés et jugés normaux, sinon acceptables. Notre société (patriarcale et capitaliste, entre autre) est encore loin d’être égalitaire. Elle conserve la trace de son histoire, de ses dominations et bains de sang. Tous ses thèmes se retrouvent dans les pratiques ésotériques et magiques, ont vu naître ce que j’appelle « carto-cringe » ou, en plus long : ces cartes qui me font grincer des dents / me mettent mal à l’aise (quand elle ne sont pas simplement inacceptables et ne déclenchent de la colère et de la tristesse – mais nous y reviendront). J’ai compilé des images de cartes, par thèmes, en essayant de mettre en avant les biais et stéréotypes, pour inviter à la réflexion, agrandir nos horizons et points de vue. Le but n’est pas d’accuser ou de blesser, d’agresser les créateurs des cartes mais d’ouvrir la conversation : pourquoi et comment accepter des images qui blessent ? Quand une carte dit, symboliquement, que vous n’existez pas ou ne devriez pas exister, qu’elle vous rapproche à la mort, à la monstruosité, à l’anormal ? Si tout n’est pas aussi tranché ou dramatique, ces images existent. Je trouve important d’en parler, de les voir, pour pouvoir, par la suite, mieux faire. C’est la question des valeurs, de ce qui vous fera choisir une action (ou un jeu de cartes) plutôt qu’une autre. La série, sur Instagram, se retrouve ici : #CartoCringe. Mes réflexions, aujourd’hui, bien qu’elles soient peut-être dispersées, veulent cibler les injonctions aux corps des « minorités » – avec des guillemets quand on sait que les femmes, la moitié de l’humanité, sont jugées comme telles.

Il y a un véritable problème de représentation : les images, comme les mots, ont des impacts. Quand ils justifient des agressions, physiques comme verbales, ce n’est pas innocent. Souvent, le mot « représentation » est utilisé pour parler des médias, donc de ce qui est montré et vu. Les publicités, par exemple, et leurs constantes objectivations et sur-sexualisation des corps (perçus comme) féminins, exhibés pour faire vendre. Le terme est ici plus large, parle, de manière générale, de ce qui est mis en avant ou invisibilisé. Les cartes, de Tarot comme d’Oracle (ou autre…), ne sont pas que des archétypes. Les symboliques, des mots comme des images, disent davantage. Elles sont les répercutions directes de nos normes et usages, traduisent de ce qui est communément accepté / encouragé ou refusé / découragé.

De manière un peu simpliste, je mets en avant trois critères (négatifs) de représentation : invisibiliser, fétichiser ou stéréotyper.

L’invisibilisation, c’est ignorer ou supprimer une caractéristique, chercher à effacer une partie de la population dans les images, sinon dans les actes. C’est une violence sournoise : ne pas trouver de vêtements à sa taille, puisque « symboliquement », nous n’existons pas. Ne pas avoir accès aux soins nécessaires. Subir un mobilier inadapté, qui peut aller jusqu’à nous mettre en danger. Ce sont des injustices systémiques – gravées dans notre société, qu’il faut démanteler, en grattant pour des considérations et des droits qui devraient aller de soi. C’est aussi participer à la réécriture de l’histoire (exemple : blanchir une figure racisée, « oublier » qu’il n’y avait pas que des opposants politiques dans les camps de concentration, prétendre que Vichy n’a pas fait tant de mal que ça, et j’en passe). Tout part des mots et des images. Le langage vient définir une réalité, ensuite martelée et appuyée jusque dans les faits.

La fétichisation, ou le fait d’exacerber le caractère aguichant / séducteur d’une personne, souvent en adoptant un point de vue masculin (hétéronormatif et cisgenre). C’est, simplement, ramener une individualité à un physique, la transformer en objet, en bien consommable et utilisable. C’est insultant, ça fait aussi beaucoup de mal. Les corps (perçus comme) féminins subissent de nombreuses injonctions : une jeune femme doit être ci ou ça, souvent fine, lisse, sans « imperfections », douce, « pure », sans poils, etc. C’est subir l’avis d’autrui jusque dans sa chair. C’est participer à la culture du viol, apprendre à certains types de population à ne pas être elle.eux-même pour respecter une idée préconçue, à craindre des répercutions, en cas de non-respect des lois tacites. C’est entretenir la charge mentale, obliger à passer du temps et de l’argent pour entrer dans la norme et ne surtout pas se faire remarquer. Apprendre à se surveiller soi-même, à se juger et à se détester. Ça mène à beaucoup de mal, psychologiquement comme physiquement.

Enfin, l’utilisation et la répétition de stéréotypes néfastes. C’est, comme son nom l’indique, des représentations nocives et négatives – des visuels irrespectueux et insultants, qui reprennent des idées préconçues, absurdes mais particulièrement vicieuses et méchantes. Ne pas connaître ne justifie pas de dénigrer, moquer ou insulter. Des erreurs arrivent, oui, mais il nous appartient d’essayer de faire mieux.

Ici, de manière succincte et simplifiée encore, une partie des thèmes visés, et, un rappel, en art comme en cartomancie : un style ne justifie pas d’affiner / de blanchir SYSTEMATIQUEMENT les corps. Ma réflexion tournant autour de la représentation des corps, je me dois de rappeler la société dans laquelle nous vivons : patriarcale et capitaliste. Où tout doit se vendre, faire du profit, où les corps (perçus comme) féminins sont un bien comme un autre ou presque. C’est la peur des autres, une oppression systématique à peine cachée, que l’on fait semblant de ne pas remarquer. Il est question du « gaze » (le regard, le point de vue, la perspective, de là où on se place, etc) : la norme contient des injonctions, cherche à forcer une façon d’être, d’en faire un moule, un modèle à reproduire. Ce modèle de beauté veut alors plaire à ceux qui l’ont conçu et cherchent à le maintenir.

Le Male Gaze et la fétichisation des corps reprennent une vision de la femme comme appartenant à l’homme. Son apparence est alors pensée pour séduire et plaire, n’a pas de but et d’existence en soi. Les corps qui ne respectent pas ses injonctions arbitraires sont alors dénigrés et rabaissés, vus comme « moins que » et effacés : ils deviennent tabous, rares et anormaux. Or, les corps n’existent ni pour servir ni pour plaire à autrui. Prendre du poids ou de l’âge ne devrait pas être un critère de beauté ou de supériorité. Nous sommes tellement plus que nos enveloppes.
Ce regard passe par la mise en avant de corps nus ou de choses considérées comme attirantes sexuellement. On y retrouve entre autre la mise en avant de poitrines rondes et fermes, de tailles marquées, avec de la nudité gratuite et des cambrures / positions voulues aguichantes. Cela sert dans un même temps à rabaisser les corps plus communs / réalistes avec leurs dissymétries, poils, rondeurs et marques – il y a oppression et processus d’humiliation.

Il est difficile de parler des injonctions patriarcales sur les corps sans parler de body-shaming. Il y a des conséquences à sortir de la norme – volontairement ou non. Les corps, comme les esprits, sont surveillés et « shamés » (dans la version française du mot verbe anglais « to shame », qui désigne l’action de rendre honteux.euse / de critiquer). Le but est de pousser une personne à manquer d’assurance. C’est une tactique de dépréciation systématique pour faire entrer dans la « majorité » (qui n’en est pas vraiment une) et pousser à suivre les normes. Les personnes perdent en estime de soi et en amour-propre, reproduisent les schémas toxiques envers elles-mêmes et envers les autres, ce qui permet de faire perdurer un système oppressif et néfaste. Le corps subit de nombreuses discriminations, qui diffèrent selon les identités genrées pour lesquelles nous passons (le « passing » : fait d’adopter des codes genrés ou de ressembler à ce qui est accepté comme féminin ou comme masculin). S’ensuivent de nombreuses violences, psychologiques comme physiques (remarques constantes sur le poids, moqueries, harcèlement, agressions, etc.) Le body-shaming cherche (entre-autre) à éradiquer la prise de poids et fait culpabiliser le moindre changement de taille – même quand un.e enfant est simplement en train de grandir et s’approche de sa silhouette d’adulte. Chez certain.es, la grosseur démarre au 40 ou au premier bourrelet. À partir du moment où les médias et les marques de vêtements insistent sur la minceur et suggèrent que faire du S (une taille 36) est préférable à une autre taille, au danger de quitter la « normalité » quand, en France, la véritable taille « moyenne », selon les sondages, est le L ou le XL (une taille 40 ou un 42), il y a un problème.
[« En 2016, une start-up de la mode nommée ClicknDress, a réalisée une enquête auprès de 55 000 femmes françaises âgées de 17 à 65 ans, qui a prouvé que les tailles 36 avaient 3 fois plus de choix que les tailles 40. Or, en France, se sont les tailles 40 et 42 qui sont le plus portées, et les Françaises sont 40% à faire une taille 44 et plus. » issu d’un article de mars 2021 ou encore cet excellent article Lemon Curve de décembre 2020 : « (…) la taille 34 qui est répandue sur 0,7% des femmes en France leur offre la possibilité de choix d’environ 14% de l’offre des robes donc 1470 modèles (la robe est pris comme vêtement de comparaison). En parallèle, la taille 46 que porte 9% des femmes, ne propose que 0,6% de robes soit seulement 65 modèles. Il est donc évident que les marques de mode n’ont pas conscience de la taille des femmes et qu’elles ne proposent pas assez une offre adéquate. »]
Les faits sont réécrits pour suivre les injonctions patriarcales et plaire aux regards masculins – si les faits sont moins tranchés, la théorie l’est. Le poids est une autre de ces injonctions : tout comme l’âge, l’ethnie, la couleur de peau ou nos capacités physiques ou mentales, elles sont particulièrement vicieuses puisque nous n’y pouvons rien. Ce sont des discriminations réelles qui ont des impacts. Le but est d’effrayer et de culpabiliser les corps : tout ce qui est associé à la grosseur est vu comme dangereux et malsain, ce qui pousse à se surveiller, à violenter son corps (par exemple en cessant de s’alimenter, à faire des « détox », des régimes et tout un tas d’autres choses que le capitalisme nous propose pour non pas régler un problème de santé mais pour s’aligner aux injonctions). Le problème, ici, est que les injonctions aux corps sont irréalistes. Il est normal et même sain que nos corps et morphologies évoluent au cours de nos vies, des saisons, etc. Beaucoup de ce qui est jugé comme des « imperfections », des choses « sales » ou « dégradantes » sont en réalité parfaitement naturelle. Les règles, la pilosité, la « peau d’orange », les vergetures… Les corps ne sont pas faits pour rester lisses et « doux ». Ils évoluent sans cesse, et pas en « avant » et en « après ». Au lieu d’examiner le passé ou le futur, pourquoi ne pas se concentrer sur le maintenant et sur le présent ? Sur les sensations, sur ce que votre corps vous permet de faire ? Chacun et chacune n’a pas les mêmes possibilités, j’en suis bien consciente. Vivre peut être un combat, chaque jour peut-être difficile. Je ne cherche pas à édulcorer les vécus ou à les effacer, seulement à proposer une voie plus juste, qui demande moins. Moins de sacrifices, moins de haine et de honte. Second problème, et pas des moindres : la société joue de nos complexes. Elle nous les impose, leur donne forme, les nourris pour mieux nous proposer ses « solutions miracles », pourvu que l’on donne de l’argent. L’économie de la minceur et des régimes, mais aussi de la chirurgie esthétique, gagnent de l’argent en utilisant nos peurs, nos envies et besoins de se sentir acceptés et aimés. Des besoins qui, soit dit en passant, sont normaux. Notre humanité est utilisée contre nous. Se changer physiquement n’est généralement pas la solution. S’aimer ne devient pas une évidence quand un certain chiffre ou une certaine taille est atteinte. Au contraire : les « rechutes » sont encore plus dures, sont vécues comme des échecs, comme des erreurs. Quand on sait que les régimes, les « coupe-faim » mènent toujours à une reprise de poids – à moins de suivre un régime à vie – on comprend l’étendue des dégâts. Et c’est sans compter, évidemment, sur les problèmes de notre système de santé qui, l’œil exercé, juge et tâte de la marchandise (surtout quand elle est perçue comme féminine) pour la prévenir, avec « tendresse et bienveillance », qu’elle vient de prendre un peu de gras et qu’il serait bon qu’elle les perde aussi sec. Des représentations négatives laissent des traces, notamment sur le plan psychologique. Autre point : le patriarcat souhaite nous occuper, préfère que l’on accepte ses normes, que l’on s’épuise à les suivre plutôt que de se questionner et de le remettre en question. Il préfère insulter ses opposants, met en place des discriminations et des boucs émissaires pour s’assurer de l’acceptance voire de la complaisance de sa « majorité ».

La grossophobie ou l’hostilité envers les personnes grosses ou jugées comme. Sans vouloir diminuer une lutte ou des ressentis, il faut savoir que la grossophobie est plus profondément ancrée dans notre société que le body-shaming : les personnes grosses voient leur vie bien plus impactée que s’il était simplement question de discours culpabilisants ou d’insultes. Vivre dans une société qui souhaite vous effacer est difficile. Quand même les places de train ne sont pas adaptées et que prendre les transports mène presque systématiquement à subir des agressions… Tout part de certaines idées et symboles, sur-véhiculés et globalisés pour qu’ils soient perçus et vécus comme vrais. Il en va de la pensée commune / majoritaire, de la doxa et des stéréotypes. L’un d’entre eux, repris et nourris par une partie elle-même du corps médical, est que le poids impacte directement la santé. La présence de graisse est vue comme maladive, pensée comme la source de tous les maux. Il est négatif et inutile de tout relier au poids. Se blesser peut ne pas y être relié. Et oui. Tout n’est pas aussi simple. Une personne peut être grosse et faire beaucoup de sport. Même être un.e athlète. Le fameux IMC (Indice de Masse Corporel), utilisé pour statuer sur les « stades de la grosseur », a été pensé par un homme, pour… Roulement de tambour. Oui oui, pour les hommes. Il prend en compte un homme caucasien. L’IMC est alors complètement caduc (donc nul) quand on parle des femmes. Pire encore quand on parle d’une femme non-caucasienne. Les corpulences, silhouettes, densités osseuses et manière de stocker le gras ne sont pas les mêmes. Cet indice voulu universel ne l’est pas. Et, pour couronner le tout… Il était pensé pour une utilisation à échelle nationale, pas individuelle. Ce qui n’empêche pas notre cher système de santé de le brandir à tout bout de champ.
On confond à tort forme physique (cardio) et apparence / poids. La force, l’indice musculaire et les capacités cardiaques ne sont pourtant pas des indicateurs de « minceurs ». Pire encore : les doubles-standards. On accepte qu’une personne mince n’aime pas le sport, qu’elle n’en fasse pas. On ne surveille pas son alimentation, elle peut librement manger en grande quantité et tous les types de nourriture, y compris les plus grasses, sans un commentaire ou presque. Au contraire, la moindre rondeur amène les commentaires. À croire que la personne a besoin de conseils et de remontrances, qu’elle, comme un.e enfant, ne sait pas s’occuper d’elle. Un physique ne donne pas de droits : non, nous ne pouvons pas toucher, tâter, pousser, palper, commenter ou éduquer une personne parce qu’elle est comme elle est. La supériorité, le mépris voilé de bonnes intentions doit s’arrêter. C’est rabaissant, culpabilisant, déshumanisant et très patronisant (récupéré de l’anglais « patronizing » pour parler de mansplaining ou d’une attitude condescendante et supérieure qui vise à éduquer et à infantiliser – patriarcal, donc). Il faut arrêter de culpabiliser les corps : chacun et chacune, en soi, a le droit d’exister. Il ne devrait pas y avoir de « sous-corps » ou de hiérarchie du souhaitable. La vie n’est pas une course ou une compétition. Il n’y a, à mon sens, pas de but universel. Nous sommes simplement là. À nous de trouver ce que nous voulons ou non faire. À nous d’apprendre à nous connaître et de faire nos choix en connaissance de cause / conscience.
Juger une partie de la population « moins bien que » par son poids est une aberration. Les associer au glauque, au monstrueux et à la mort tout autant. Dire qu’une personne grosse est forcément en mauvaise santé est un amalgame dangereux. Une personne peut avoir pris du poids à cause d’un traitement médicamenteux. La prise de poids n’est pas systématiquement antérieure ou première, elle peut être une conséquence : ce n’est pas un « mal », une maladie unique qui fonctionnerait d’une seule et même façon. Certains corps sont naturellement plus larges que d’autres. La densité osseuse joue aussi beaucoup. Alors refuser des soins médicaux à une personne sous prétexte qu’elle est forcément en mauvaise santé parce que grosse est ridicule. C’est comme ça que l’on stigmatise, que l’on ajoute des oppressions et des maux, psychologiques comme physiques. L’injonction à la maigreur doit cesser. À certaines époques et dans certains pays, être rond.e était un signe de bonheur et de bonne santé. Ce qui, malheureusement, de nos jours, n’est rappelé ou réutilisé que pour enfoncer davantage les corps osant sortir de la norme fine : une personne grosse sera alors le.a grand.e méchant.e riche, insensible et fainéant.e ou, dans un cas plus genré, la femme de famille trop fertile, « flasque » et large – « dégoutante » (et je ne parle même pas des intersections et des biais racistes qui viennent s’y ajouter). Il serait bon d’éviter les clichés. Parce qu’ils sont dépassés, qu’ils font plus de mal que de bien. Et que les maux endurés sont réels.
Soyons clair.es, je ne dis pas qu’il n’y a pas, dans certains cas, des conséquences, (j’évite l’utilisation du mot « surpoids », puisqu’il se base sur une norme de poids dite « idéale » et « normale », et pire encore avec le terme « obèse », qui est censé indiquer une maladie mais désigne une morphologie basée sur le fameux IMC (ou comment réifier / chosifier les gens en les réduisant à une taille / a une maladie : pour reprendre les mots de @Corpscools, dit-on « le.a cancéreux.euse » pour désigner une personne malade ? Pas trop, puisque c’est insultant et très péjoratif) – un amalgame mauvais et dangereux) mais, et même dans ce cas : et alors ? La santé est du domaine de l’intime, du confidentiel. En quoi nous regarde-t-elle ? En rien. Contrairement à ce que certaines personnes pensent, la « body positivity » (littéralement « positivité des corps ») n’a pas de taille maximale (voir @Corpsgros, dans les ressources de fin d’article). Le mouvement cherche à mettre en avant l’amour de soi et de son corps, quelle que soit sa taille, sa morphologie. Il s’agit de déconstruire les pensées pour sortir du schéma patriarcal et de l’image de la « Femme » – comme concept / objet. C’est un processus long et non-linéaire, avec, aussi, des jours sans et des « rechutes » où l’on ne se trouve pas aussi belle.beau que nous le devrions. Ce n’est, parfois, pas possible. Pas quand on nous a appris à haïr notre reflet, dans le miroir. Pas quand on a appris à détester et à violenter son corps. Dans ces cas-là, s’accepter est déjà un grand pas (d’où le terme « body acceptance » : acceptation du corps).
La santé va au-delà des chiffres, et ne devrait plus se penser qu’en termes de corps : le mental a énormément d’importance. Il nous est impossible d’aller bien et d’être bien quand nous nous détestons, même inconsciemment. Tous les corps méritent d’exister. Aucun corps ne mérite d’être pointé du doigt, moqué ou violenté. Certains corps ne sont pas plus méritants d’amour que d’autres. Il faut chercher une voie d’équilibre qui soit respectueuse, en arrêtant de survaloriser la perte de poids, bien trop mise en avant comme positive, belle et plus acceptable et souhaitable. Il faut mettre en avant un changement de perspective, de point de vue : ce n’est pas au corps de changer pour entrer dans x vêtement ou taille ou mobilier. Il ne faut pas changer son physique, son corps, mais au contraire changer sa façon de penser et voir le monde. Laissons les corps tranquilles. Arrêtons de culpabiliser, de rendre honteux.euses. Nous devons arrêter la surveillance et le jugement. Cela ne nous mène nulle part, notre société peut en témoigner. Pourquoi ne pas écouter, au lieu d’invisibiliser et de blesser ?

Une autre oppression systémique qui ne devrait pas avoir lieu : le racisme. Les corps devraient pouvoir exister en paix. Le simple fait d’être ne devrait en aucun cas pouvoir justifier d’une soi-disant infériorité. Contrairement à ce que l’on nous dit, nous ne naissons, dans les faits, ni parfaitement libres, ni parfaitement égaux. La preuve : une certaine corpulence, un trait physique, une couleur de peau et il est presque accepté, presque normal que l’on demande certaines choses de vous. Des avis, des contacts, des actes sont imposés. Ce n’est absolument pas normal. Nous connaissons les grandes lignes de nos Histoires et patrimoines. Et pourtant. Nous continuons de rejouer les mêmes biais, les mêmes violences et dynamiques de domination. Selon le lieu de vie, le nom de famille, la couleur de peau, les possibles ne sont pas les mêmes. Les conditions de vie non plus. Les stéréotypes racistes évoluent pour mieux se cacher, sont d’autant plus fourbes qu’ils prennent une autre apparence. C’est la question des « cités », des « jeunes à problèmes ». Le manque de moyens et d’aides, l’indifférence attirent la criminalité – pas les origines ou la couleur de peau. D’autres amalgames dangereux, issus de stéréotypes racistes (la fainéantise, le manque d’intelligence, le goût du mal et de la violence, la sauvagerie, etc) sont ici exprimés. Le racisme prend de multiples formes, est, dans tous les cas, une charge systémique non négligeable. En plus de porter un passé difficile, les personnes subissent, chaque jour, le rappel de leur « différence ». Des regards, des gestes, des paroles, des actes. Leurs ressentis doivent être écoutés et pris en compte. Etre n’est pas une invitation. Notre société est particulièrement viciée, sait être aveugle quand bon lui semble (quand elle en tire profit). C’est ce dont il est question : on profite des corps, de la peur. Tout un marché essaie de vous faire changer. Il veut vous blanchir, vous affiner, vous lisser, vous façonner. En plus de ces injonctions qui souhaitent effacer les traits individuels (et ici, européaniser/franciser en dénigrant le multilinguisme, les traditions et les racines), il y a l’appropriation culturelle.

C’est un sujet trop souvent mis de côté. Non, ce n’est pas innocent. Non, en tant qu’êtres sur cette planète, nous n’avons pas droit à tout. C’est un privilège que de réclamer et prendre sans rien donner en retour. Les cultures en question ont été (sont peut-être encore) discriminées et dominées. L’esclavage, la colonisation, les guerres sont passées par là. Pour saper les bases, détruire les traditions et les enseignements de peuples dits « sauvages », « sans connaissances » ni « cultures ». L’appropriation culturelle repose sur un mouvement de domination : une personne d’une autre culture cherche à prendre, à faire sien (à approprier) un sujet ou objet sensible, qui a une histoire particulière. Pour en lire plus, c’est ici. Je tenterais tout de même de résumer le phénomène : l’appropriation culturelle, c’est quand on décide de devenir un chaman (terme russe issu du sybérien šaman qui désigne les peuples toungouses et, de manière géographique, les peuples de l’Asie de l’Est / de l’Extrême-Orient, à tort utilisé de manière interchangeable pour tous les peuples natifs et leurs pratiques, surtout avec les peuples premiers d’Amérique). C’est quand on décide de devenir prof de Yoga quand on ne connait que les asanas (les positions et mouvements – le Yoga est bien plus large qu’un « sport »). C’est quand on utilise du palo santo et des plumes d’aigle (protégées et réglementées) pour purifier sa maison. C’est quand on décide de « devenir » un.e pratiquant.e natif.ve américain.e (seul.e). L’appropriation c’est quand on s’accapare d’un concept sans faire de véritables recherches, sans faire d’efforts ou être véritablement initié. C’est déplacer le concept du tantrisme pour qu’il ne tourne qu’autour de la sexualité. Evider et lisser des thèmes pour qu’ils nous plaisent, qu’ils nous servent, qu’ils nous rapportent, qu’ils ne choquent pas des sensibilités et connaissances caucasiennes/européennes. Il y a aussi toute une dimension mercantile, qui vient, une fois de plus, prendre ce qui appartient aux communautés déjà opprimées, portant souvent de lourds passés et héritages. Pour l’éviter : il faut questionner, remettre en contexte, s’intéresser, donner de soi. Au sujet en question, aux détenteurs.rices du savoir qui nous intéresse. Se rapprocher de la source, voir ce qui se fait, ce qui se dit. Découvrir que la sauge blanche est une plante native américaine sacrée dont l’utilisation massive par la communauté sorcière menace de faire disparaître. Qu’elle est volée par d’autres pour le profit. Que les natifs américains sont perdants de ce marché, que la plante est en voie de disparition, qu’on leur vole leurs pratiques. Encore ! Les exemples sont multiples. Il ne faut plus effacer, supprimer les voix des concerné.es. À nous d’écouter, de voir ce qu’il se passe, de se renseigner, même si c’est désagréable, même si ça prend de nos ressources et de notre temps. Si nous ne sommes pas décidés à mettre quelques heures de côté pour chercher et apprendre, si lire 3 articles ou définitions, écouter 2 vidéos et lire un livre est de trop… Alors nous ne sommes pas intéréssé.es. Alors il vaut mieux que nous en restions à nos propres cultures, toutes aussi riches, importantes et passionnantes. Il est possible d’apprécier une culture sans se l’approprier, mais cela demande de l’humilité et des efforts. L’appropriation est une forme de racisme : elle dit de manière détournée que les personnes en question ne méritent pas d’argent, de respect ou de rétribution, que la « culture » en question n’en est pas vraiment une, qu’il n’y a pas de mal à venir piocher ce qui nous arrange pour refuser ou oublier ce qui ne nous plaît pas. C’est une nouvelle violence, un acte de pillage, qui indique la supériorité de celui qui prend et fait sentir ses privilèges et son mépris. Il n’y a pas de respect ou d’échange mais la continuation de dynamiques de domination.

Les corps, quand ils sortent des canons de beauté patriarcaux, sont dénigrés. Ils ne sont plus vus comme « utiles » et « séduisants ». Ils se rapprochent du monstrueux, sont vus comme une menace, comme un phénomène à rendre honteux et à réprimer. Or, nous sommes comme nous sommes. Nos corps ne devraient pas être des sources de stress et de honte – nos héritages, besoins et cultures non plus. Nous ne devrions pas à avoir à subir un monde qui n’a pas été pensé pour soi, qui se moque, veut cacher, étouffer, et même supprimer… Car oui, il n’y a qu’un pas. On commence par invisibiliser, puis, se faisant, on fait sortir de la norme, on accepte les agressions, avant de maintenir en place les injustices et les horreurs – on rend systémique les discriminations, on les tolère, quand on ne les encourage pas.

Une autre injonction sur les corps : l’âgisme (discriminer sur l’âge / le vieillissement). Prendre de l’âge, grandir, vieillir, même, ne devraient pas être des expériences négatives. Les personnes âgées (quand elles sont perçues comme des femmes notamment) subissent des discriminations, et pas qu’à l’embauche. Si elles sont coquettes, féminines et « bien conservées », elles sont socialement acceptées – et encore, en tant qu’exception qui confirme la règle, ce qui n’empêche pas certains regards, du mépris entre les générations. Mais si elles ne le sont pas… Elles deviennent trop « masculines », ne sont plus désirées, sont jugées inutiles. C’est une des conséquences du patriarcat et du regard masculin. Si la femme ne peut plus rapporter, n’est plus fertile, elle est alors « défaillante », sa « valeur marchande » baisse. C’est tout simplement honteux. Et pourtant, cette honte, c’est les corps qui la portent. En essayant de cacher les cheveux blancs, d’atténuer les rides, les tâches de soleil, en subissant divers traitements ou régimes pour rester « belle.beau ». Et selon qui ? C’est encore subir l’avis d’autrui, se comparer constamment, ne pas s’aimer, se restreindre, se changer, se faire, en somme, du mal. Il y a trop peu de représentations positives de la vieillesse. On montre des femmes « gâteuses » ou aigries, dépendantes (affectivement) ou au contraire insensibles, des grands-mères poules ou bien des « sorcières », dans le sens injustement négatif qui persiste de nos jours. Développer d’autres images est important. Nous ne pouvons pas vivre en craignant demain. Faire la paix avec soi et avec le temps, avec son corps et ses capacités serait salvateur. Pourquoi marquer l’injuste différence : un homme serait mûr et superbe en assumant ses cheveux « poivre et sel » quand une femme serait négligée et devrait se « reprendre en main » ? Finissons-en, s’il vous plaît, avec l’hypocrisie et les doubles-standards.

Il en va de même pour les handicaps, qu’ils soient définitifs, momentanés ou chroniques, physiques comme mentaux ou psychologiques. Ne pas être « au top », à « 100% » de ses capacités est vu, dans notre monde capitaliste, comme de la mauvaise volonté ou de la fainéante, comme une « faiblesse de caractère ou de constitution ». Cette façon de penser est particulièrement négative et néfaste. Elle reprend le mépris du patriarcat pour les femmes, et la fertilité : qu’il s’agisse des règles, de la grossesse, de l’avant ou de l’après, toute faiblesse est une raison de moquer, d’avilir le corps et la personne. Le validisme, c’est effacer et oublier les, justement « non-valides ». Les personnes qui n’ont pas les mêmes capacités, les mêmes possibles. C’est, encore une fois, ne pas être prévu : il n’y a pas d’ascenseurs, les escaliers sont trop raides avec de petites marches, il n’y a pas de pente, pas de bancs (ou, s’il y en a, ils sont scindés de barres inconfortables), les mobiliers sont inadaptés, entraînent de l’inconfort, l’impossibilité de les utiliser, de se déplacer, des douleurs, du stress, toute une charge mentale (trouver les endroits accessibles, réagir en cas de finalement non-accessibilité, rebondir, s’épuiser davantage encore pour être prêt.e, etc…) et même une mise en danger. Toutes les maladies, tous les maux ne sont pas visibles. Il y a différents degrés, de la nuance, comme toujours. Tout ce qui est maladie fait peur. La société prime la santé parfaite, est particulièrement véhémente et hostile, fuit ceux qu’elle juge « anormaux », voire « moribonds » – ceux qui ne peuvent remplir les quotas de productivité et de travail dits « importants » ( = qui brassent de grosses sommes d’argent) de notre société.

Mais ce que le capitalisme et le patriarcat prônent ne sont PAS la seule voie. Cette « norme » n’est, en vérité, même pas majoritaire. Les corps, ne font pas que du S. Il est normal et même sain qu’ils évoluent. Représenter la beauté et la diversité de TOUS les corps est fondamental. Pour briser les tabous, redonner confiance, soutenir, faire preuve d’acceptation et de bienveillance. Deux autres points, pour finir sur les normes : l’hétéronormativité et la cisnormativité. Tout le monde n’est pas hétérosexuel (attiré par les personnes du sexe opposé). Il y a ici aussi tout un spectre (ce pourquoi l’acronyme LGBT (Lesbienne, Gay, Bisexuel.le, Trans) évolue et grandit), différentes manières d’être, de penser ou d’exprimer sa sexualité (ou son identité de genre). Le mythe du couple parfait papa-maman doit être repensé. La famille ne se pense pas qu’à deux. Il est aberrant d’opprimer et de restreindre à ce point la vie des autres. Pourquoi vouloir effacer, chercher à interdire, à faire du mal ? De la même façon, de nombreuses personnes ne sont pas cisgenres (personne dont l’IDENTITE – c’est une construction sociale – de genre (masculin, féminin) correspond avec son corps de naissance – l’inverse de transgenre). Dans notre société, nous avons du mal à séparer identité de genre et organes sexuels (de naissance). Nous assignons, plaquons alors des caractéristiques, des envies et des besoins sur les enfants et personnes, en fonction de ce avec quoi ils.elles sont né.es. Il y a, pourtant, des personnes non-binaires et transgenres. Les deux options que la société prônent actuellement ont été crées et construites : il n’est pas bien compliqué de décider, tout aussi arbitrairement que la première fois, qu’il est temps d’en ajouter / de les changer. L’apparence de genre (le « passing »), les réalités biologiques, l’amour et la sexualité sont des thèmes particuliers, sans évidences, sans véritables normes. On peut par exemple ressembler à une femme, ne pas en être une, aimer les hommes sans avoir de sexualité. Ce n’est pas aussi simple / duel / binaire que ce que notre société actuelle aimerait nous faire croire. Et, si vous voulez mon avis, les représentations / images / symboliques ne montrent pas assez de ce qu’il y a, dans notre monde. Les points de vue adoptés sont généralement ceux des « dominants », donc, pour faire court, des hommes blancs, valides, cisgenres et hétérosexuels. Les représentations de l’amour et de la famille sont, dans les jeux de cartes, très normées. Pourquoi ne pas travailler le doute ? Une figure n’a pas à être clairement ou définitivement genrée. Pourquoi ne pas laisser à chacun et à chacune projeter l’identité de genre qu’ils préfèrent ? En attendant de diversifier les visuels et les symboles, pour dissoudre la norme et la rendre moins agressive et violente (en invisibilisant et niant les vécus et réalités).

J’espère que mes synthèses auront été claires sans trop simplifier, que cette réflexion, bien affirmée, aura su interloquer et questionner. Ouvrir des ponts, créer une discutions, une possibilité d’ouverture, accueillir « l’autre ». Le but n’est pas de crier à la perfection, mais de tenter une plus grande bienveillance. Et pour cela, pour ne pas faire d’ « impairs », il faut essayer, apprendre, se renseigner. Il est impossible de faire mieux sans s’interroger et apprendre. Ce qui passe par un changement de point de vue, de « gaze » : il faut prendre une autre place que la sienne, regarder le monde différemment. Déconstruire, surtout. Sortir du binaire et des « normes », prendre suffisamment de recul pour les questionner.

Tout ça pour dire que je rêve de jeux de cartes (mais aussi de publicités, pendant qu’on y est) plus inclusives et respectueuses. Je ne veux pas que des symboles / archétypes mais des représentations variées et non-stéréotypées. Je veux du respect, de la réflexion, pour sortir de la pensée dominante masculine. Pour sortir de la domination tout court.

Liens et Ressources :
#CartoCringe
L’incroyable Cathou Tarot : ici et, sur son blog, sa chaîne Youtube et .
Sélections de ses écrits : sur les représentations dans les Tarots, la part 2, un coup de gueule.
Un exemple de Roue des privilèges (Slide 2 !) chez @Clear_the_deck
@tellmeoceane « Comprendre la notion de privilège social »
@tellmeoceane « Complexes VS discriminations »
« Spirituality without Shadow Work is denial » par @serpentfire
Inciting A Riot, « Yes, this is our paganism » sur le racisme et l’appropriation culturelle dans les maisons d’édition ésotériques
@Lanuitremueparis sur l’écriture inclusive
@Laharpy « Le masculin n’est pas neutre »
@Lanuitremueparis « Le Mansplaining »
@francetvslash « Si tu es une femme, ces trucs du quotidien n’ont pas été pensés pour toi »
@nour_tjrs_pas_ltemps « Les processus discriminatoires par étapes »
@Lanuitremueparis sur la non-mixité
@Lanuitremueparis Le Mythe de Méduse, part 2
@Lanuitremueparis : « Je ne m’habille pas comme une salope, c’est toi qui pense comme un violeur »
@Lanuitremueparis « Tenue appropriée »
@Elodie.arnould « Les femmes et la beauté »
@Lanuitremueparis « Le corps »
@Preparez_vous_pour_la_bagarre Sur la question de point de vue (gaze) dominant
@Lanuitremueparis La Parité

Grossophobie
@Corpsgros : « Définition de la grossophobie »
Rosen.Lev, « « On peut être en bonne santé à toutes les tailles » Pourquoi on ne devrait plus dire ça en 2021 »
@alexlight_ldn, Sur l’IMC (en anglais)
@lespiedsdanslesplats_, « Pourquoi l’IMC est grossophobe, raciste, sexiste »
@lespiedsdanslesplats_ « la notion de surpoids est obsolète »
@Stopgrossophobie : « L’apologie de la minceur »
@yourbodyisworthy « My body is not trip advisor, you can keep the comments to yourself »
@alexlight_ldn
« The best weight you can ever lose is the weight of people’s opinions »

@Corpscools : « pourquoi la corrélation entre grosseur et mauvaise santé est faussée » (sur le covid et les comorbidités)
@Corpscools : Grossophobie, covid, comorbidité et santé
@Corpscools : « Du choix des mots » (le termes « obèse »)
@Corpscools : « A diet is a cure that doesn’t work, for a disease that doesn’t exist »
@Corpscools : « I am not a body positivity campaigner, I am a fat liberationist… »
@Corpscools : « Est-ce que c’est grossophobe de vouloir perdre du poids ? »
Article de Gabrielle Lisa Collard : « Est-ce que c’est grossophobe de vouloir perdre du poids ? »
@Stopgrossophobie : « Je ne suis pas un.e mince emprisonné.e dans une carapace de gros.se »
@tellmeoceane « Nous ne sommes pas des corps minces emprisonnés dans des corps gros »
@Corpsgros : « Le mouvement Body-Positivity n’a pas de limite DE TAILLE »
@Corpsgros : « Phrases grossophobes à ne plus utiliser »
@Corpsgros :  » « La FAT Tax » ou l’économie des personnes grosses »
@Corpsgros : « La grossophobie VS le Body-Shaming »
@Corpsgros : « Les trois niveaux de la grossophobie »
@Corpscools : « Je suis radicalement opposée à la chirurgie bariatrique »
@Asmae (@Rosecitronvg) « Body Positivity, Fat Acceptance et Body Neutrality »
@Tessholiday Grossophobie et médias

Body-Shaming
@Maedusa, part 1 : « Toustes mes héroïnes » (non aux injonctions, oui aux goûts personnels)
@Maedusa, « The Do and the Don’t, partie 2 : les standards de beauté »
@Mel Robbins, « Trash the pants, not yourself »
@Corpscools : « Oppression et libération de la grosseur : la plupart des femmes minces croient qu’elles pourraient devenir très grosses si elles « se laissaient aller »… »

Racisme et Appropriation
@Lanuitremueparis : Le Fétichisme
@henikapetal « Tantra does not mean sex »
@elodie.rosewitch « Fumigation : penser local pour décoloniser ta spiritualité »
Le live d’@africcan_ et de @themagicianstribes : « Spiritualité et appropriation culturelle, les conséquences sur nos héritages »
@lecerclevertueux « Le vrai prix de la sauge blanche »
@lecerclevertueux « Alternatives plus éthiques à la sauge blanche / palo santo »

Validisme
@raplapla_et_porte_voix : Définition du validisme
@autistequeer_le_docu « La rhétorique validiste »
@Corpscools : Capitalisme et santé/validisme
@psy.tabou « On n’est pas fainéant.es, ni faibles. On lutte tous les jours contre une/des maladie.s chronique.s. Ça demande bien plus d’énergie et de force que vous ne pourriez imaginer ou supporter.
@raplapla_et_porte_voix « Maladie ou handicap invisible ne signifie pas imaginaire. »
@le_validisme_cest sur l’autisme
@_conpassion_ exemples de phrases validistes ; ou ici ; ou là
@CathouTarot sur les biais et la question des auto-diagnostiques

Agisme
@LaNuitRemueParis, définition illustrée
@féminisetaculture : définition de l’âgisme
@lesgrenades présente Caroline Ida Ours, mannequin de 61 ans qui milite contre l’invisibilisation et l’âgisme
@fiona.n.schmidt
« Agisme et sexisme au cinéma »

@labanane.bxl
« Luttons contre l’âgisme »

@laisselesridestranquilles sur la ménopause
@laisselesridestranquilles sur l’horreur du vieillissement et de la mort
@laisselesridestranquilles sur l’âgisme
@laisselesridestranquilles sur l’âge dans la publicité
@coupdevieilles : Age et cinéma
@coupdevieilles « 4 raisons pour expliquer l’âgisme anti-vieux (et anti-vieilles) »
@soyonselegantes « Les hommes ne vieillissent pas mieux que les femmes, ils sont juste autorisés à vieillir »
@jaipiscineavecsimone « IL N’Y A PAS D’AGE POUR ENTREPRENDRE QUOI QUE CE SOIT »

Hétéronormativité / Cisnormativité
« Pour plus de diversité dans les romans jeunes-adultes » par Planète Diversité
@ftm_is_human, Eclaircissements sur le termes « trans »
@Rosen.lev : « « Ton orientation sexuelle, ton genre, c’est une phase… » Sauf que… »

Je regrette de n’avoir pas autant de ressources à proposer selon les sujets, n’hésitez pas à les compléter avec vos propres recherches !

[Réflexions] Loi de l’attraction, positivité toxique, privilèges et responsabilités

A

Je vous retrouve pour un nouvel article réflexions, qui a pris plus de sept mois pour voir le jour, sur un autre sujet qui me tient à cœur. J’ai tenté de développer ma pensée au mieux pour partager ma réflexion, en espérant qu’elle puisse mettre en avant un autre point de vue sur le sujet. Pour lire les précédents articles de la série : sur la purification systématique et les privilèges puis sur les notions d’énergies genrées sacrées et de polarité masculine-féminine. En sorcellerie comme en développement personnel, l’idée de la fameuse loi karmique de l’attraction est très importante. Si je ne pense pas tout savoir, j’ai essayé d’apprendre et de me renseigner pour que ma pensée soit la plus complète et la plus nuancée possible. Malgré cela, il faut s’attendre à quelques raccourcis, bien que j’espère les éviter. Mon but est moins de juger et d’accuser que de mettre en avant et questionner des normes dominantes ainsi que nos œillères, des points de vue subjectifs se faisant passer pour objectifs (des « lenses » en anglais, ou les objectifs / verres d’un microscope ou de lunettes, ce qui teinte notre perception du monde).

Tout d’abord : qu’est-ce que la loi de l’attraction ?
C’est à l’origine le Conseil Wiccan (The Wiccan Rede) mis en place par Gerald Gardner de ne pas faire de mal. Les actions, bonnes comme mauvaises, sont répercutées par trois (La Règle des Trois / The Rule of Three). Ainsi, il est plus profitable de faire le bien que le mal. On attire ce que l’on fait, en quelque sorte. Cette idée, dans l’ensemble, peut paraître cohérente. Que la Wicca se montre extrêmement positive, lumineuse et inoffensive aussi. Historiquement, la sorcellerie est et a été très mal vue. Il n’est pas inutile de rappeler qu’il y a eu des mort.es. Vouloir protéger ses arrières, mettre en avant une philosophie de vie spécifique et montrer « patte blanche » fait sens. Autrement, le mouvement, en partie précurseur des hippies, aurait certainement été étouffé ou aurait subi encore plus de violences et de récriminations. Il en allait de la survie, de l’acceptation et de la popularisation de la Wicca.

Le concept est-il seulement lié à la spiritualité ou à la magie ? Dans les faits, non : les sciences cognitives / du comportement s’y intéressent et mettent en avant les notions de « manifestations », d’ « affirmations » et de « visualisations ».
Le développement personnel vient se baser sur ces idées, généralement pour « recalibrer » son cerveau, sortir de ses schémas et habitudes de pensées, pour modifier la structure et le mode de fonctionnement de ses pensées. En effet, le cerveau est habitué à reconnaître des signes et à les interpréter d’une certaine manière, en fonction de ses expériences passées. C’est pour cela qu’il peut être si difficile de modifier ses habitudes et de changer ses manières de faire, ce que nous faisons et pensons ayant de fortes influences sur notre manière d’appréhender et de faire sens du monde. Si l’on est optimiste, on aura tendance à voir le bien de manière plus systématique et, du coup, d’enregistrer plus de positif qu’une autre personne. L’inverse est aussi vrai. Un exemple concret, avec les synchronicités. Quand on commence à « ouvrir les yeux » et à faire attention à un certain type de signe, les messages ont généralement tendance à affluer. Quand la voiture familiale a changé de marque, nous avons commencé à voir le même modèle partout, parfois dans la même couleur. Si cette découverte était troublante, tout le monde n’a pas adopté ce modèle en même temps que nous : il était donc déjà-là, avant. Mais nous ne le remarquions pas. S’éveiller à certains points peut avoir des conséquences sur nos perceptions : selon l’endroit où l’on se situe, nous ne vivons ou ne voyons pas les mêmes choses. Nous ne donnons pas les mêmes significations aux mêmes événements, certains étant occultés quand d’autres peuvent nous sembler (subjectivement) de première importance. Ce que nous pensons nous influence – c’est le biais de confirmation : nous agissons plus ou moins consciemment de manière à valider nos biais et idées préconçues, d’où l’idée de prendre du recul sur ce qui nous paraît évident ou aller de soi. Nous ne sommes pas aussi objectifs et impartiaux que nous le pensons, notre expérience n’est pas universelle et ne peut pas faire loi. Nous ne pensons pas tous de la même manière. Il peut alors être intéressant d’entraîner son cerveau à percevoir certaines choses et à se laisser impacter davantage par le positif, plutôt que d’être écrasé et assailli par le négatif. Le principe peut donc être un outil de développement personnel, la sorcellerie et la science se rencontrant avec l’idée de « manifester », de faire advenir, d’attirer quelque chose dans sa vie, par la mise en place d’affirmations ou de visualisations, qui doivent préparer le cerveau et l’esprit à aller dans la direction choisie.

Les limites et dérives : abus et privilèges
Dans le cas du développement personnel comme dans celui de la spiritualité, les affirmations et les tentatives d’attirer x chose dans sa vie peuvent finir par être problématiques. Je m’explique : l’idée que l’on est parfaitement responsable de ce qui nous arrive est fausse et même dangereuse.
Avoir en tête sa responsabilité personnelle est important. Vouloir se soulager et aller bien / mieux n’est pas négatif. Il est question de morale, d’éthique, de légalité aussi. Mais, vous me voyez peut-être venir… Quoi de ce qu’on ne contrôle pas ? Le hasard ou le destin, ou bien les deux, ont une grande part dans nos vies. Si l’on peut se contrôler, essayer de n’attirer que le bien et le positif, par exemple, qu’en est-il des autres ? Chacun et chacune ayant cette même liberté, il est impossible d’empêcher les accidents et les conflits. Et l’idée d’attraction est devenue une manière de responsabiliser les victimes. Non, tout n’arrive pas « pour une raison ». Un exemple très courant, après une agression sexuelle : « et tu étais habillé.e comment, déjà ? ». Il y a inversion des responsabilités. Et ce n’est pas tout. Il y a d’autres problèmes, de nombreuses, à mon sens, dérives.

La loi de l’attraction est un des piliers de la Wicca par la fameuse Règle des Trois : tout ce que l’on fait, en bien comme en mal, nous revenant par trois, ce qui motive les bonnes actions et vise à décourager tout ce qui ne serait pas totalement positif ou lumineux. La NéoWicca (« Nouvelle Wicca ») se veut plus hétéroclite et rompt avec les règles, hiérarchies et enseignements premiers de la religion, accumulant et mêlant les connaissances et panthéons, les mythologies et les savoirs. Il est courant de voir des pratiques mêlant des cultures très différentes, empruntant aux modes de pensées nordiques, aux panthéons égyptiens, grecs comme aux pratiques Indiennes (en reprenant les chakras, le yoga, …). Ce mouvement, plus libre, moins « contraignant », cherche le synchrétisme et appelle à une certaine « mondialisation » : au mélange des savoirs, sans questionner certaines associations ou se souvenir de réalités historiques ou géographiques. Ainsi, l’idée de Karma n’est pas européenne. C’est une notion qui a été récupérée ailleurs et est, le plus souvent et comme bien d’autres, simplifiée. La pensée hindoue dépasse l’idée de conséquence, entre dans un cadre précis, avec les idées de réincarnations et de travail vers la paix intérieure (pour se défaire des conditionnements néfastes qui nous retiennent et nous rendent malheureux, le but étant d’atteindre la fin de son cycle de réincarnations et de réduire ses blocages et son karma négatif – littéralement « actions » ou « actes »). Le karma en tant que répercutions immédiates est une version occidentalisée, son utilisation hors-contexte étant une façon de faire coloniale et dominante, en particulier quand on parle de cultures ayant subi l’invasion européenne. L’idée de karma est, de fait, de plus en plus associée à la Règle des Trois, les termes pouvant être utilisés de manière interchangeable. Quoiqu’on puisse en trouver après une déconstruction et un long apprentissage, les termes n’ont pas les mêmes origines, ne sont pas issus des mêmes pensées : la Wicca est anglosaxonne et européenne, ne repose pas sur la culture de natifs opprimés et soumis à l’esclavage. Certaines réalités sont trop souvent oubliées. Il y a, derrière certaines appropriations, beaucoup de violence. Etre curieux et vouloir développer ses savoirs n’est pas une mauvaise chose, mais il faut, comme toujours, prendre du recul et questionner ses motivations et façons de faire. C’est la question de l’appropriation culturelle, des biais racistes, des privilèges et de la (re)mise en place d’une interaction de dominant à dominé, de supérieur à inférieur.
Cette façon de se servir ailleurs et de nier les réalités historiques, sociales et géopolitiques a encore lieu aujourd’hui, et de bien des façons, notamment par le spiritual bypassing ou la « fuite spirituelle » en français. C’est l’idée de refuser les émotions et ressentis d’une personne au nom d’un statut spirituel plus haut, de ne pas se remettre en question mais plutôt d’attaquer, de nier l’humanité d’autrui en argumentant qu’il faut « voir le positif » ou que la colère indique un problème en profondeur chez la personne victime d’abus (par exemple en niant systématiquement les problèmes qu’une appropriation peut soulever). Ce comportement est très commun dans la sphère sorcière en ce qui concerne le racisme, l’appropriation culturelle, le sexisme, les mots ou comportements plus que limites. L’injustice est commune, oui. Et il faut du courage pour la signaler. Petite parenthèse : ce qui ne veut pas dire que c’est à cette personne d’éduquer, de prendre par la main celui ou celle qui lui a fait du tort pour lui expliquer et lui permettre d’évoluer. Parce que c’est une charge mentale, de temps et d’énergie conséquente et qu’il est impensable d’exiger cela d’une personne. Sauf dans le cadre d’un cours rémunéré, cela va de soi. Exiger, c’est encore entrer dans et perpétuer une dynamique de domination. L’autre ne vous doit rien. Si cette personne fait remonter quelque chose de problématique, à vous de vous interroger. Sans entrer dans le déni. Oui, il est plus confortable de faire l’autruche et de se sentir attaqué en tant qu’individu. Sauf qu’il faut prendre du recul et remettre les éléments à leur place. Il y a déjà eu attaque, et dans l’autre sens. Des mots ou comportements ont blessés. Peut-être n’étaient-ils pas conscients, soit, mais ça n’excuse pas tout.
Se déconstruire est un travail long et compliqué, désagréable. Mais nécessaire. Il est temps que chacun et chacune prenne ses responsabilités et fasse ce travail, sans refuser légitimité, écoute et respect à autrui, minorité ou non. Les ressources existent, parfois même gratuitement, il suffit de chercher. Il est bien trop simple, par exemple, de dire « je ne vois pas les couleurs ». Alors que si, bien sûr. La société est profondément inégalitaire. Elle repose sur des principes stéréotypés, des normes voulues universelles – je vous renvoie à mes précédents articles. Le sexisme et le racisme sont systémiques – tout comme, entre autre, le validisme. Enregistrés dans le cerveau comme normaux. Mais tous les corps n’ont pas la même force, la même énergie, les mêmes possibles. Tous les corps ne sont pas traités de la même façon. Nous le savons. Nous ne pouvons plus le nier. C’est refuser les handicaps, visibles ou pas, ignorer le mal-être et les maladies mentales, ignorer les différences que l’on fait, qui sont faites, entre les corps. Tout le monde n’a pas la même disponibilité, le même niveau d’énergie, les mêmes possibles, les mêmes moyens. Insinuer le contraire est un mensonge. Non, tout n’est pas possible du moment que la « volonté », y est. Le concept de volonté lui-même, de « will-power » (le pouvoir de l’esprit / du vouloir), est faussé. C’est un des mythes du développement personnel et de la recherche de la productivité qui est à présent réfuté. Il n’est pas, plus question de faire plus mais, à mon sens, il faut faire moins, mais mieux. Choisir ses batailles pour ménager son énergie, ses « cuillers » (spoons en anglais). Prendre des décisions est drainant. Se disperser, faire plusieurs choses à la fois (le fameux multitasking) l’est encore plus. La volonté ne changera pas la course du soleil dans le ciel. La volonté ne suffira pas à une personne malade pour vaincre sa maladie, son mal-être. Il y a des maux chroniques, durables. Tout ne peut pas être surmonté, ce n’est pas une question de motivation, de « vouloir » ou de fainéantise.
Dire « passe à autre chose, fais-toi à l’idée, je ne vois pas de quoi tu parles, ta parole est fausse et n’a pas de valeur à mes yeux, je refuse ton ressenti et ton témoignage, ton histoire »… Ne va pas. Nous ne pouvons pas continuer. Cette forme de manipulation a un nom. Gaslighting en anglais et « décervelage » en français. Je répète : c’est une forme de manipulation. De domination. Déshumaniser et refuser la parole à une personne n’est pas positif. Loin de là. C’est simplement hypocrite et bas.
Oui, je le sais bien : c’est, bien souvent, une question de point de vue. Jusqu’où aller dans l’écoute et le « respect de la parole » d’autrui. Tout ne se dit pas forcément. Comment faire, pour trancher ? Pour identifier les dynamiques dont il est question, différencier la vraie blessure d’un ego habitué à dominer ? Je n’ai qu’une solution – je suis au courant de sa fragilité, de sa faiblesse potentielle, oui, mais que faire d’autre ? Ne rien faire n’étant plus une option – et c’est d’apprendre. De lire ou d’écouter, de se renseigner. De voir ce que les concernés et concernées ont à dire sur le sujet. Ecouter leurs expériences, les accepter, apprendre, pour mieux réagir, en savoir plus, pour la prochaine fois. Ne surtout pas rester sur ses acquis et sur ses positions, faire travailler son empathie, adopter un autre point de vue, sortir de ses œillères personnelles. Faire le deuil du passé, des erreurs. Ce qui est fait est fait. Il faut avancer, faire mieux, d’une manière ou d’une autre.

Comment, autrement, parler de positivité et de « ne pas faire de mal » ? Tous les adeptes de développement personnel / de la lumière (avec le « light-work » par exemple) ne sont pas wiccan, j’en ai conscience. Mais quand on prône « la lumière », le « bien », l’optimisme et le positif, il faut que son impact aille dans le même sens, vous ne trouvez pas ? Une question de logique, pour moi. Aller au bout de ses idées, faire ce que l’on met en avant et loue.
Il en va de la responsabilité générale et individuelle de se regarder en face, pour de bon. Pourquoi être sur la défensive ? Aller directement vers la colère et la haine ? S’il était vraiment question de respect, de dialogue et de positivité, il n’y aurait pas besoin d’avoir recours à ce genre d’outils. X personne n’est pas moins humaine parce qu’elle implique d’aller au fond du sujet, de voir les rouages cachés, de comprendre d’où viennent les choses, de les remettre en question.
Pour reprendre la formule « ne pas faire de mal » : quoi de l’impact écologique ? Qu’est-ce qui est mangé, qu’est-ce qui est consommé ? Quoi des discours, de l’attitude ? S’agit-il d’être vocal pour défendre les autres, de promouvoir le respect et l’égalité ? Parce que si ce n’est pas le cas, il s’agit de se complaire dans ses privilèges. Non, rester silencieux ne rend pas une personne « positive ». Bien au contraire. La colère peut aussi être légitime, user de son statut ou de ses pratiques magiques pour écraser une personne en souffrance avec des injonctions à « la lumière », non merci. Il me semble aberrant d’invoquer une « neutralité » ou une envie de ne garder que « de bonnes ondes » quand il est question d’humanité, de respect et de responsabilité. Pour reprendre la pensée hindoue, le yoga n’est pas qu’un travail du corps mais aussi de l’esprit, qui avec les yamas, cherche la non-violence et l’équité, le respect et la sincérité. De la même façon, la loi de l’attraction n’est pas un joker pour oublier les sujets sensibles. Il est plus que temps de voir le problème en face, d’essayer de faire quelque chose. Ce conseil ou cette règle de vie ne peut pas être une incitation à la passivité. Ce n’est pas juste quand ça me plait, quand ça me sert. Non. Mettre en doute la victime et lui intimer que c’est de sa faute, qu’il est question de sa responsabilité à elle ? Non. Cette personne n’a pas choisi d’avoir peur, de souffrir, d’être violentée et rabaissée. C’est aux bourreaux de prendre leurs responsabilités, pas l’inverse.

Après cette prise de position plutôt définitive, je tiens à nuancer un peu, pour, sans abandonner mes valeurs et ma logique, être réaliste et éviter de tomber dans la « pureté militante » (régulièrement utilisée pour rabaisser et essayer de soumettre au silence certaines personnes, jugées non spécialisées ou pas assez actives dans leur champ d’action). Il n’est ni bon ni possible de demander un engagement constant et parfait. Nous sommes tous humain.es, en cours d’apprentissage. Ce qu’il y a de mieux à faire, c’est justement de faire de son mieux, sans chercher les lauriers, la validation. À chacun, à chacune son chemin, pourvu qu’il soit lancé, que l’itinéraire soit envisagé. Le monde est fatiguant. À nous de nous préserver, en veillant à ce que ce ne soit ni systématique, ni au détriment d’autrui. Et en évitant les double-standards. Une femme, une personne issue d’une minorité raciale ou non, n’a pas à faire plus d’efforts qu’une autre personne. Le militantisme, la responsabilité individuelle, le respect des autres, c’est pour tout le monde. Exiger qu’une personne vocalise, se positionne sur tout, tout le temps, ce n’est pas possible. Il faut être réaliste, et commencer à son échelle. Faire ce que l’on peut. Dans le respect et la limite de son corps, en toute conscience. Ce travail, cette charge en plus, tout le monde doit la porter, pour soulager certains et certaines. C’est un travail finalement de groupe que de changer le putride de cette société, d’y planter de nouvelles graines. Ce n’est pas seulement pour les femmes, elles ont – à bon entendeur – déjà bien assez à porter.

Ressources :
En Français :
Sur la positivité toxique, par @tetedanslune sur Instagram
Loi de l’attraction et privilèges, par rosen.lev sur instagram
Racisme et Féminin Sacré par @dreamingraccoon (Cléa- Doula des bois)
Rappel : Tout ce qui brille n’est pas bienveillant, et c’est valable aussi pour la spiritualité par @elodie.rosewitch (Élodie, sorcière des jardins)
Santé gynécologique et pouvoirs magiques – le Witch Gaze par @dreamingraccoon (Cléa- Doula des bois)
Le développement personnel peut-il être problématique ? par @aurane.k sur Instagram
Vidéo Youtube « Les 3 problèmes du développement personnel » de Sarah Lazarey
Vidéo « Pourquoi le développement personnel ne marche pas ? Solution : le Shadow Work » (Sur les affirmations positives) de Sarah Lazarey
Sur la pureté militante, par @aurane.k
Sur le gaslighting, par @aurane.k
Elite matérielle, élite spirituelle, par @labulledalissia
La vidéo youtube « Le problème du Féminin Sacré » de Sarah Lazarey
En anglais :
Toxic positivity vs genuine optimism par @anxietyhealer
Toxic positivity and privilege par @carloshappynpo
Toxic positivity par @mind_witch_mama
Signs of toxic positivity par @doodledwellness
Spiritual Bypassing by @machasjustice

[Réflexions] Purification systématique : fin de la spiritualité et privilèges

A

Plus le temps passe et plus certains sujets me hérissent le poil. J’ai souvent l’impression que le racisme et les biais, le point de vue des dominants, de la « norme » ne pourra jamais être véritablement remis en question, qu’en sorcellerie aussi, le capitalisme a tout désacralisé, nous éloigne toujours plus de l’esprit, nous déracine. Quand je vois une remarque de plus sur la nécessité ou même le besoin, l’obligation d’utiliser de la sauge ou du palo santo, par exemple. Quand je vois encore et toujours que des concepts pensés « exotiques » ou « primitifs » deviennent en vogue et sont mentionnés à tort et à travers, qu’ils sont « adaptés » aux européens que nous sommes, souvent en se vidant de leur sens ou de leurs implications premières, au détriment des cultures et des personnes dont c’est l’héritage et la vie. Je sais bien que, souvent, c’est un manque de connaissance et de recherche, de l’innocence, peut-être un peu naïve, mais qu’on ne cherche pas à mal faire. Mais devant l’ampleur de la tâche, je m’épuise. Comment informer, « éduquer » ? Comment pousser les personnes à dépasser l’apparence, la première lecture, à entrer en recherche et trouver ses propres sources ? Ne pas savoir n’excuse pas tout, pas quand il est question de domination et de violence. C’est justement comme ça que l’on excuse un grand nombre de maux : le sexisme et le racisme pour ne citer qu’eux. C’est, une fois de plus, à nous de nous éduquer, de tenter d’apprendre pour mieux faire. Je passe encore par là, c’est un travail sur une vie. Se remettre en question, y consacrer du temps et de l’énergie, se renseigner, être curieux et surtout se montrer humble. Je ne détiendrais jamais toutes les réponses. Ni pour moi, ni pour les autres. Ce qui ne m’empêche pas d’essayer de diffuser cette urgence, ce besoin de faire ses propres choix, en conscience, de savoir pour ne pas suivre la nouvelle « norme » sans s’interroger, sans comprendre ce qui peut être en jeu. Ne pas voir, ne pas savoir, c’est le confort de ceux et de celles qui en sont pas directement concernés : c’est un problème de privilégié.es. Ce n’est pas parce qu’on ne subit pas directement les conséquences de nos actes et de nos discours qu’ils n’en affectent pas d’autres. Il n’y a pas qu’un point de vue, qu’une réalité. Et nos choix, nos achats, nos silences, nos paroles ont un poids. J’ai moi aussi fait des erreurs, je suis moi aussi en cours d’apprentissage. Mais je sais certaines choses et j’éprouve le besoin de rejoindre, de diffuser une réflexion qui a fait changer ma vision du monde, du sujet. Je pense ici beaucoup aux posts d’Occvltacrafts. Toutes mes références, sources et lectures seront regroupées en fin d’article. Il est inconfortable et déstabilisant de se remettre en question. Mais c’est aussi salvateur, nécessaire. Je ne cherche pas à pointer du doigt, à crier une sorte d’avance ou d’ « évolution » par rapport à d’autres personnes. À chacun, à chacune son rythme. En espérant que le temps vienne où il sera normal de tout mettre en doute, de ne pas se reposer sur une ou deux voix, sur ce qui est accepté et encensé. J’aimerais faire changer les choses, oui, j’aimerais une révolte, un bouleversement. Je sais aussi que ce n’est pas cet article, cette tentative de prise de conscience qui fera changer le monde. Alors, en essayant de se souvenir de l’humanité de tous et de toutes, en acceptant que l’erreur est humaine, voilà ma pensée sur le sujet. Au programme : questionner, remettre en question l’injonction à la pureté et à la purification. Développer mon point de vue sur le thème, les ramifications, conscientes ou non, dont il est question.

Ayant été influencée par la Wicca et les suites du mouvement New Age, j’ai découvert une grande variété de panthéons, de manières de faire, de disciplines, de plantes. Mais aussi, un seul mode d’emploi. La lumière, le pur, le propre, le sain, le purifié. Il n’y avait que cette boule de lumière, ce faisceau de blanc. Et si l’idée de cocon ou de protection me rassurait, elle a fini par montrer ses limites. Tout n’est pas soit tout blanc, soit tout noir. Et le « noir » n’est pas forcément mauvais. Les extrêmes, la dualité, la « polarité », ne m’intéressent pas. Je veux de la nuance, de la réflexion, quelque chose qui me parle, vraiment, qui soit plus réaliste, plus adapté à ma vie, à ce en quoi je crois. Et j’ai découvert un mode de pensée des « énergies » qui fuyait les esprits. La Wicca, qui rejette l’idée de diable et de démons Chrétienne – c’était logique – ne savait pas quoi faire des fantômes, des esprits. Dans un point de vue animiste, tout se complique. Parce qu’il n’est plus seulement question d’un méchant esprit frappeur ou du mauvais sort qu’une mauvaise sorcière aura lancé. L’animisme, pour faire très très court, est une philosophie de vie, un mode de pensée où chaque chose aura un esprit. Le vivant, mais aussi les pierres, le minéral, tout ce qui a une étincelle de vie et de « nature » en soi. Les humains, donc, mais aussi les animaux, les plantes et ce qui fait le monde et la nature. On comprend facilement qu’une plante ait un esprit, que ce dernier n’est pas forcément mauvais. La question de l’esprit (que je retrouve dans sa version anglaise dans le mot spiritualité), me semble évidée, creuse. Il y a aussi du gris, du neutre. Un couteau n’est pas mauvais parce qu’il peut couper. Un plant d’ortie n’est pas mauvais parce que l’on peut s’y piquer. Pareil avec les épines d’une rose ou bien avec une plante toxique. Ce n’est pas sa faute si l’on vient s’y frotter. Elle n’est pas responsable de son utilisation. Tout ne peut pas entrer dans le binaire et le manichéisme du bien versus le mal. La vie est bien plus complexe que cela. La nature aussi. Elle n’est pas que verdoyante et nourricière, protectrice et bienveillante. Elle est, simplement, à sa façon. Doit-on vraiment la juger, essayer de la réduire pour la faire entrer dans notre vision lacunaire et duelle de la vie ? Je ne crois pas.

Pour revenir à mon propos initial, la façon dont la purification est devenue systématique (de soi, de son espace, de ses outils, de tout ce que l’on fait entrer dans sa vie, de tout) me paraît problématique. Parce qu’elle sous-entend que le monde est sale. Qu’il a besoin d’être nettoyé et purifié. Je n’aurais jamais l’idée de purifier un bout de jardin ou une plante verte. Sommes-nous censés purifier la nature, notre nature, en nous ? Il ne semble pas y avoir de limite au phénomène, il faut absolument se protéger de cette énergie sombre, noire, négative. D’où vient cette peur ? Ce thème du monde comme souillure et dégradation, qui me semble empreint de l’idéologie chrétienne, par exemple ? Le monde est alors le temps des épreuves et de la tentation, du mal, avant de mériter sa place en haut ? J’ai beaucoup de mal à accepter sans remettre en question cette idée de nécessité. Je ne suis pas contre la purification, les rituels de protections, les fumigations, l’utilisation de sel, ou autres manières de faire. Ce que je remets en question, c’est la généralisation, la banalisation du phénomène. Déjà, dans ma pratique et étant influencées par la pensée de la sorcellerie traditionnelle, comment peut-on être sorcière, comment peut-on se protéger et bénir si l’on ne peut pas répondre et maudire ? En ayant bien sûr conscience de ses actes et en en acceptant les conséquences. Pour rebondir sur les thèmes évoqués, la nature n’est ni bonne, ni mauvaise. En se basant sur cette simple constatation, les esprits qui y habitent et nous entourent sont certainement plus complexes que cela. Des êtres avec des caractères, des envies, des sautes d’humeur et des individus plus malicieux, plus colériques que d’autres. Si on choisit de ne pas catégoriser toute la population humaine, pourquoi décider que tous les esprits, tels qu’ils soient, d’où qu’ils viennent, seraient mauvais et tenteraient de nous porter atteinte ? Cette peur constante, ce rappel de la protection insinue qu’il y a des raisons à cela : si c’est potentiellement le cas à un moment ou à un autre, je ne souhaite pas non plus généraliser, ne vaut-il pas mieux invoquer de la mesure et une étude de la situation ? Cette façon d’être me semble disproportionnée, sinon (attention, le mot est fort) paranoïaque. Tout le monde ne cherche pas à nous faire du mal. Les esprits, le monde, la nature non plus. Alors pourquoi cherchons-nous à ce point l’aseptisé ? Le problème est complexe et nuancé, oui. Il y a différents cas de figures. Pourquoi, donc, systématiser cet acte magique ? Surtout quand on regarde les outils en question : ils sont principalement exportés, amenés d’ailleurs. Du sel d’Himalaya, de la sauge (edit : je parle dans cet article de sauge blanche), du palo santo… Autrement dit des outils que l’on a fait venir de loin, qui ont traversé le monde, viennent avec du plastique et une empreinte carbone importante, et je ne parle même pas des objets en eux-mêmes. Pour ce qui est de la sauge et du palo santo, on sait que ces plantes sont originaires d’Amérique, qu’elles sont utilisées par les Amérindiens, et que leur utilisation intensive ici à des répercutions là-bas. Les concernés en pâtissent, nous utilisons des plantes sans apprendre à les connaître, sans rien savoir de leur histoire ou qui les concerne. Il faut juste en avoir, les brûler pour bien tout nettoyer, tout décaper et être en paix. Quand les plantes sont en voie de disparition, qu’elles sont volées aux personnes qui les font pousser et les utilisent dans leurs pratiques depuis des décennies (pour ne pas dire centaines d’années), que ces dernières ont été colonisées, spoliées, tuées, évangélisées de force, expropriées et j’en passe… Je grince des dents. Vouloir continuer à les utiliser malgré des messages des concernés, c’est abuser. C’est simplement entretenir et reproduire des dynamiques de domination, basées sur des génocides et des bains de sang, se servir de ses privilèges, faire de l’appropriation culturelle. Pas de recherches, pas de réel intérêt, pas de réflexions, c’est du rapide, du tout cuit, livré en 24H. Aucune connexion à sa géographie, aux plantes de sa culture ou de sa région. De l’apparence, de l’argent, du matériel : de la sorcellerie « plastique », donc, du capitalisme avec un joli ruban « spirituel ». Sauf que ce que nous faisons à des conséquences : le Conseil Wiccan (The Wiccan Rede) pour les concerné.es, le Karma pour d’autres, la conscience morale et la responsabilité individuelle pour tous et toutes. Je pense que vous voyez un peu plus où je me situe, et ce n’est pas encore terminé. Parce qu’il en existe évidemment, des alternatives européennes et locales, pour purifier ! Le Thym, l’Armoise et le Romarin, par exemple. Pas besoin de se ruiner, pas besoin de les faire importer, ils peuvent venir de chez nous et faire moins de mal. Le problème étant que la majorité ne les connait pas, ne pense pas à se remettre en question. Pourquoi le ferait-elle ? C’est, je le pense, en toute bonne foi que l’on conseille de la sauge ou qu’on systémise la purification, dans les ouvrages « pour débutants » par exemple ou quand on nous demande par où commencer. Cet article est là pour tenter de proposer une autre voie : l’écoute, l’étude. Vérifier qu’un nettoyage, qu’une purification est nécessaire. Ou proposer quelque chose de différent, de moins fort. Pour ne pas faire fuir ou abîmer les esprits qui nous entourent : ce serait bien la fin de la « spiritualité ».

Ma réflexion (il était bien temps de mettre les pieds dans le plat) se base sur la cartomancie, et la « règle » de nettoyer, de purifier son jeu à l’achat. Je l’ai moi aussi fait, évidemment. Parce que c’était la seule manière de faire, que c’était nécessaire. Mais pourquoi ? (Attention, j’y vais fort) Nettoyer les énergies d’un jeu imprimé en masse et assemblé par des enfants (par exemple) ne changera pas là d’où il vient. Nous, globalement, savons. Nous choisissons simplement quoi voir ou pas, où dépenser notre argent, notre énergie et nos pensées. Pourquoi cette peur de l’ombre, du mal, du « sale » à outrance ? Pourquoi rejeter en vrac, en masse l’achat de jeux de cartes « seconde-main », qui polluent moins et font, éthiquement, moins de mal ? Les esprits ne sont pas tous mauvais et, en cartomancie, c’est de l’esprit du jeu dont il s’agit ! L’accueillir en l’en chassant n’est pas ce qu’il y a de mieux (oui, si les énergies de l’objet vous déplaisent, faites-vous confiance, mais si et seulement si cela vous semble nécessaire). En cas d’objet historique ancien lié à des génocides ou à de grandes catastrophes ou des actes de haine, je peux comprendre ce besoin, oui. Mais pour un jeu qui n’a connu que l’impression, la fabrication et l’emballage, pourquoi se donner cette peine (les livreurs ne sont pas tous des démons, je vous rassure) ? Bon, je force un peu le trait, mais je pense que ce problème est réel. J’ai pu sentir la différence, au fil du temps. Comprendre de première main pourquoi ce jeu qui m’avait tant attiré et plu s’est avéré silencieux, voire apathique pendant des semaines, même des mois, après l’avoir purifié. Je pensais, naïvement, que ce laps de temps était nécessaire pour « forger la connexion », lier nos énergies et apprendre à nous connaître. Ce n’était pas le cas. Forcément, après du sel, de la fumigation, de la visualisation et que sais-je encore ! Le pauvre jeu était déboussolé, vidé. Je pensais bien faire mais je ne faisais que retarder notre collaboration, en considérant le jeu comme souillé, empreint d’énergies basses et effrayantes à faire fuir – ce n’était que lui. Ni bon, ni mauvais. Juste lui. Et, entre nous, pourquoi faire de la cartomancie, utiliser des cartes si ce n’est pas pour dialoguer avec autre que soi ? On dirait presque qu’il faut rationaliser et purifier une pratique sale. Sauf que les cartes, ce n’est pas tout blanc, tout rose ou quoi. Ce n’est pas simplement du développement personnel. Non, c’est de la divination, de la cartomancie, du travail d’énergie et un dialogue avec Autre chose, avec des esprits, selon ma pratique et pensée. C’est une pratique ancienne, avec une histoire. Qui a été diabolisée, humiliée, que l’on cherche à aplanir pour qu’elle plaise, pour qu’elle se vende, pour faire des chiffres. Elle restera, pour moi, une pratique à part, une sortie de la norme, la décision de se tailler une voie en quittant le sentier rassurant du social et de l’admis.

Une dernière pique, pour le plaisir, sur les notions d’appropriation culturelle, de domination et de racisme : cette recherche du pur à tout prix reflètent à mon sens (attention, je répète, ça va piquer) les angoisses et privilèges de personnes qui n’ont pas à subir une oppression réelle et systématique sur leurs pratiques spirituelles, de cartomancie et de magie – cette généralisation peut ne pas être vraie à tous les coups, je l’admets. Mais quand on a peur pour sa vie, que sa pratique peut conduire à la mort, par exemple, il y a d’autres choses à faire, à penser. Si notre véritable problème est de savoir comment purifier notre dernier achat… c’est pitoyable. Dans le cadre d’un tirage de cartes ou de l’acquisition d’un nouveau jeu, ne pas purifier ne devrait pas pouvoir nous porter préjudice, alors pourquoi répéter « bêtement » et de manière automatique ce procédé – dans le cadre d’un objet ancien, très animé ou de seconde-main, pourquoi ne pas visualiser les énergies jugées inopportunes pour choisir quoi purifier sans abîmer l’esprit de l’objet ? Le rendre obligatoire en vide le sens, peut jouer contre nous.

Alors, OUI, la purification peut être importante, voire nécessaire. Mais il faut aussi prendre du recul et s’interroger. Pourquoi sommes-nous en train de recréer, même dans l’ésotérique, dans la sorcellerie (donc le pas de côté, le sauvage et le danger, la nature contre le village et la civilisation) des normes ? Nous sommes tous et toutes différents. Nos pratiques le sont certainement aussi. Il n’y a pas une voie, pas une règle. Expérimentons, marchons à l’aveugle. Apprenons, découvrons.

Ressources :
– En Français :
terrorem.vitriol – DE LA PURIFICATION
terrorem.vitriol – DE LA PROTECTION
terrorem.vitriol – DE L’EXPLOITATION
elodie.rosewitch – D’où viennent les plantes que tu utilises dans ta pratique ?
elodie.rosewitch – Rappel : un rituel n’est jamais neutre, et c’est la moindre des choses que de se renseigner avant de l’utiliser.
jusquiame.pindura – la sorcellerie maintenant
jusquiame.pindura – sorcellerie et prophétie
Eric Fassin : « L’appropriation culturelle, c’est lorsqu’un emprunt entre les cultures s’inscrit dans un contexte de domination »
Valiel Elentári : Comprendre la différence entre l’appropriation culturelle et l’appréciation culturelle
jusquiame.pindura : Réflexions de sorcière – « plastic witchcraft » et l’idée de « norme » en sorcellerie
jusquiame.pindura : Réflexions de sorcière – en sorcellerie aussi, le paraître prône-t-il sur l’être ?
– En Anglais :
occvltacrafts – smudging, palo santo, and cultural appropriation
occvltacrafts – what to ask yourself before magically cleansing or expelling
Occvlta – Cultural Appropriation in the Path of Poisons
Occvlta – How to Kill a Tradition: Appropriation in Current Esotericism and Spirituality
Blood and Spicebush – The Questions of Smoke: Burning Plants and Cultural Appropriation
Alex Fitzpatrick – Not For You: Cultural Appropriation in Neo-paganism and how Archaeology plays a role

Que pensez-vous de l’injonction à la purification ? Est-ce que cette pensée résonne avec votre pratique ?

[Réflexion] Energies, sacré, polarité masculine et féminine

A

Je vous retrouve aujourd’hui pour un article qui me pèse depuis quelque temps déjà. Ce n’est pas exactement ce que j’ai l’habitude d’écrire mais je me devais d’essayer. J’ai beaucoup entendu parler, comme la grande majorité, je pense, d’énergies féminines et masculines. De qualités aussi, d’attributs et d’affinités différentes. Ces pensées sont particulièrement présentes quand on parle de spiritualité, mais pas que. De nos jours, presque tout est genré. Pensé pour une catégorie particulière de public, ciblant des catégories bien précises de personnes, en fonction de critères stéréotypés. Un exemple du quotidien : le rose pour les filles, le bleu pour les garçon, mais aussi la danse pour les filles, les sports de combats ou de compétition pour les garçons. Evidemment, la liste s’allonge. Je ne vais pas rester dans le mondain pour préciser ma pensée.

Il y a supposément des énergies très différentes, que l’on retrouve dans tout et dans chaque personne. Jusque là, tout va bien, en tout cas pour moi. Là où je m’éloigne de ces idées (et où je commence carrément à grincer des dents), c’est quand on parle d’énergies féminines ou masculines. Parce que tout part du principe qu’on est ou homme, ou femme. En 2021, je pense qu’il serait grand temps de dépasser cette binarité. Si on accepte sans mal que chaque individu soit différent, comment nous faire entrer dans une boîte ou dans l’autre ? La majorité (Est-ce vraiment le cas ?) n’a peut-être pas de problème avec ces appellations, ce n’est pas le cas de tout le monde, quoi qu’on en dise. Il y a déjà ce point, et ce n’est pas tout. Je reprends : il y a supposément des énergies, que l’on retrouve chez tous les individus. Hommes comme femmes (et pas que). Ah. Ces deux énergies ont différents degrés, changent d’une personne à l’autre. Intéressant ! Ca ne dure malheureusement pas. Il est question d’énergies féminines, plus fortes chez les femmes. Et d’énergies masculines – je vous épargne le refrain. Bon. L’idée ne vous choque peut-être pas. Sauf que oui, il n’y a pas que des hommes ou des femmes. J’espère ne rien vous apprendre, mais tout est une question de nuance et de spectre. Il y a donc de nombreux cas où, non, cette étiquette et attribution de la société ne colle pas. Que le décalage soit discret, caché ou profond, il existe.

Mais ce n’est pas ça, me direz-vous, tu n’y es pas, il y a généralisation – voir mauvaise foi ! Attendons de voir. Les deux (ce chiffre fait déjà partie du problème) possèdent des énergies féminines et masculines. C’est bien ce qui coince ici. Qu’est-ce qu’une énergie féminine ? Ou masculine ? Les concepts, avec un peu de recul, sont incroyablement abstraits. L’idée de femme, l’idée d’homme, a été pensée par quelqu’un, on ne sait pas qui, on ne sait pas quand, on ne sait pas vraiment comment s’est venu ni pourquoi (pour classifier et organiser les êtres et « simplifier » les rapports ?). Ce sont des concepts qui ont contribués à instaurer une domination d’un groupe sur l’autre – vous savez, nous savons. Une énergie féminine, selon les sources consacrées, est douce, aimante, elle aide à croître, elle est fertile. C’est une mère, lisse, sensible et intuitive, tournée vers l’intérieur. La notion reprend le yin et le yang du taoïsme. La lune, sombre, face au soleil, lumineux – soit dit en passant, plusieurs mythologies, panthéons et cosmogonies possèdent une lune masculine et un soleil féminin ! Petit aparté : il existe, dans plusieurs panthéons, des dieux lunaires comme des déesses solaires. Dans la mythologie nordique, Máni est le dieu de la lune et le frère de Sól (ou Sunna), personnification féminine du soleil. Il y en a bien d’autres, dont Fati dans la mythologie polynésienne ou encore Sîn ou Nanna(r) en Mésopotamie. De la même façon, une partie des déesses lunaires était originellement solaires (ce qui explique le symbolisme solaire de plusieurs de leurs attributs : l’arc doré pour Artémis ou le disque solaire pour Isis) et les dieux, plutôt lunaires (comme Anubis) avant qu’un changement dans les représentations ait lieu.
L’énergie masculine, elle, est tournée vers l’extérieur, dans l’action, parfois dans l’agression, la protection. Ce qui me dérange ? L’image qui en ressort : l’homme fort, le guerrier, le chasseur, et la femme (sous-entendue faible, victime potentielle, incapable de se protéger et en danger), avec les enfants, l’art, les parures et les plantations, en bonne cueilleuse. Si je n’ai aucun problème avec l’idée d’énergie plus ou moins passive ou active, douce ou agressive, mon problème vient simplement de leurs noms. Je me lance : ces noms sont sexistes et stéréotypés, tout simplement.

Ils reprennent des idées que je trouve profondément problématiques. Ils jouent aussi avec ce qu’on attend de chaque genre (l’aspect social, l’étiquette, que l’on accepte ou non mais qui est apposée par la société, à ne pas confondre avec le sexe biologique ou de naissance, qui peut différer). Autre point : en reprenant l’idée binaire et réductrice qu’il y a homme ou femme, penchant-nous sur la langue. Il s’agit de mon appréciation des mots, que je souhaite objective mais, dans le doute, je reprécise que c’est ici mon avis, mes ressentis. Il y a donc féminin, qui englobe les femmes. Puis masculin, qui englobe… les hommes. Sauf que les deux termes ne sont pas neutres. Le « masculin » est… Il est lui aussi stéréotypé. Ce n’est pas aussi simple qu’une catégorie désignant les hommes. Il est genré, indique un certain type de comportement. Il est lié à la (on l’attendait) virilité. Qu’est-ce que la virilité ? Petit point définition, en prenant ce qui vient en premier sur internet, avec le dictionnaire en ligne Le Robert (à la date du 11/01/2021) :

Les premières définitions du bien nommé Trésor de la Langue Française (Informatisé)

Bon, je sais pas vous, mais pour moi, ça reste flou. Un homme, donc, c’est viril. C’est quoi, être viril, par contre ? Selon les définitions du Robert ou les nuages de mots de Synonymo, ce serait : être fort, puissant, énergique et actif sexuellement. Soit dit en passant, ces quatre traits ne sont clairement pas exclusivement relatifs au genre masculin. Pour les usages courants, ce serait plutôt une jauge, un baromètre, pour désigner les « bons » hommes (sous-entendu les vrais). Ceux qui ne contredisent pas les étiquettes genrées de la société. Ce qui induit qu’il y a de mauvais hommes (féminins, donc ?) et de mauvaises femmes, dites « viriles ». Une catégorie pratiquement fourre-tout qui vient régulièrement viser les personnes non-hétérosexuelles (qu’elles soient homosexuelles, bisexuelles, pansexuelles, asexuelles ou même d’autres choses) ou tout simplement qui ne sont pas cisgenres.

Examinons rapidement l’autre côté. Saviez-vous que « viril » avait, finalement, un équivalent ? Et non, je ne parle pas de « féminin ». Pour tout vous dire, je ne le savais pas non plus. Et pour cause, le mot n’a pas l’air d’avoir été utilisé après le XIXème siècle, il s’agit de « féminilité ». Le Robert ne le connait pas et apparemment Synonymo non plus, bien qu’il l’indique en synonyme de « féminin ». Je ne vais pas analyser en détail les deux tableaux, je vous pense parfaitement aptes à le faire vous-même. En bref : j’ai conscience que la grosse différence de nombre de mots entre « homme » et « femme » vient du côté pseudo neutre ou universel du premier. Cependant, ça ne change pas le fait que « féminin » reprenne un grand nombre d’injections de la société (pas moins de onze) pour trois termes assez neutres qualifiant la catégorie de la population plutôt que ses supposés attributs de l’autre côté. Là où masculinité regroupe deux valeurs précises, féminité propose trois termes flous ne caractérisant pas la population « femme » mais des mots utilisant la même racine. Pour le duo « virilité » – « féminilité », les images parleront d’elles-mêmes. J’ai conscience que Synonymo n’est peut-être pas le meilleur des sites, mais il reste représentatif : c’est un des premiers moteurs de recherches de synonymes proposé lors d’une recherche. Je ne tiens pas à faire plus que mentionner le scandale de début 2020 quant aux définitions de présidente, avocate et j’en passe du Larousse (mais pas que) en tant que « femmes de … ».

Pour essayer de me rapprocher de notre sujet initial, je ne peux pas laisser de côté l’idée de « féminin sacré ». Elle ne se pense pas ou très peu en dehors la fameuse idée de polarité ou d’unité sacré du couple. Ne vous en faites pas, je vais y revenir. En attendant, si je comprend les fondations et l’histoire de cette notion, elle peut aussi me faire grimacer. Pourquoi ? Petite explication : oui, le mouvement se veut positif et libérateur, apprendre aux femmes à s’aimer et à écouter leur « rythme d’êtres féminins ». Toutefois, il ne s’émancipe pas. Il essentialise toujours « LA femme ». Si apprendre aux femmes à s’apprécier et à puiser de la force en elle est vraiment génial et que je n’ai rien à redire sur la forme… Le fond est peut-être un peu différent. Je reproche aussi à l’idée de ne se penser qu’en partenariat avec le masculin sacré. Parce que oui, encore une fois, tout n’est pas soit l’un, soit l’autre, et même doublement. Je ne vais pas rappeler l’année, mais quand même. A l’heure actuelle, on sait plus que bien qu’il n’y a pas que des couples hétéros sur terre. Ceci étant dit, l’équilibre ou l’entretien de telle énergie dite féminine ou masculine à l’intérieur de soi me dérange, toujours parce que les noms sont chargés de stéréotypes sociaux dont ils ne cherchent pas à se défaire – ou alors pas assez, vu que ce que je vois est principalement rose, ou bien violet, avec tout ce qu’il faut pour entretenir la sensualité, la douceur, le calme et l’empathie des femmes. Sauf qu’une « femme », ce n’est absolument pas que ça. Une « femme » c’est un être humain, oui, comme les hommes. Ce sont des êtres avec des différences et des particularités, avec des émotions, des rêves et des envies. Oui, le plus gros vient de cette même société sexisme et inégalitaire, justement. Nous sommes conditionnés, c’est comme ça. Et s’il n’y a rien de mal avec l’idée de méditer, de faire du yoga, de boire du thé ou de se faire du bien, donner x activité aux femmes et y activité aux hommes, encore une fois, c’est assez limite. Tout est hypra genré et ça n’aide pas : c’est encore et toujours relié à ces idées d’énergies.
Autre point, et de taille : l’énergie féminine veut et doit fusionner, être compensée ou complétée par le « masculin sacré ». Il est peut-être un peu moins connu mais il existe bien. De quoi inspirer les hommes à se faire guerriers chaleureux et aimants, protecteurs et dont la seule aspiration est de combler la femme de leur vie. L’idée se veut, en tout bien tout honneur, loin de la masculinité toxique, rongée par l’insécurité, la colère, le sexisme du quotidien et les traces (bien présentes et non négligeables) du patriarcat. Sauf que, mine de rien, elle repose sur une dynamique patriarcale de domination masculine. De quoi dire que P (comme Prénom) est le mec du couple, qu’elle « porte la culotte » (le pantalon), qu’importe le type de relation.
J’y reviens : un homme n’a pas besoin d’être en couple pour être heureux (et pas forcément avec une femme) – l’inverse est vrai. Pas besoin de suivre les codes sociaux. Une femme peut se suffir à elle-même (ou non, ça marche aussi !). Pousser les gens à la binarité, les tanner pour qu’ils trouvent quelqu’un (fondent une famille, se marient, etc etc etc), on arrête, ça ne va pas. A chacun sa solution, à chacun son choix, sa liberté. En attendant, l’épanouissement ne se fait pas forcément à deux. L’épanouissement ne passe pas forcément que par l’amour (dans toutes ses formes, de l’attachement à l’Amour avec un grand A), ou pas que. Il y a la famille, les amis et j’en passe. Cette bulle, cette polarité… C’est moyen. S’il est certainement agréable de se penser en cocon fusionnel et « sacré »… Et bien pour moi, ça ne suffit pas. Rajouter des paillettes, un soupçon de bienveillance ou de respect sur des catégories sociales stéréotypés et néfastes pour chacun et chacune ne rend pas le tout plus digeste ou plus « sain ». Se considérer en individus sacrés et égaux (sur le papier en tout cas, la réalité en étant encore très loin), ça, pourquoi pas.

Après, j’accepte un type de féminin sacré. Je ne suis pas certaine qu’il tombe sous ce nom-là, mais peu importe. Parce que oui, pour continuer à briller et à garder cette flamme en vie après tout ce temps et malgré la difficulté, les femmes méritent une part de divin. Tout comme le masculin, qui souffre aussi de la hiérarchie et des codes des genres, y compris, bien sûr, ce qui est établi comme « viril ». Devoir entrer dans un moule préformaté qui ne veut pas plier, ce n’est pas une vie. Les minorités, les révolté(e)s, le méritent. Les autres aussi. Je ne vais pas confisquer leur sacré ou leur couronne aux adaptes du féminin sacré. Parce que c’est bien trop facile, bien trop courant, d’exiger la perfection des femmes. Parce qu’elles ont – nous avons – déjà donné. Et qu’il n’y aura pas de consensus, de voie unique. Parce que l’unicité des êtres, c’est pas tout à fait ça. Il n’y a que des choix, des infinités de possibilités, si nous pouvions seulement prendre un peu de recul, secouer quelques boîtes, remettre plusieurs choses en question. Et si le rose, la douceur et la beauté vous intéresse, homme comme femme, c’est tant mieux, c’est parfait. Quant à moi, ce qu’il me faut, ce que j’aime, je refuse qu’on me l’enlève – qu’on essaie seulement ! Alors je comprends. C’est le féminin dit « sombre », celui qui se révolte, qui refuse les qualifications et les injustices. La femme dans sa complexité, l’être humain dans sa création, sa douceur comme dans sa violence et sa colère. Parce que la femme est une guerrière, pas moins que les hommes. Il y a des femmes soldats. Il y en a depuis la nuit des temps, des femmes qui se battent, qui partent en guerre ou à la chasse. Tout comme les hommes. Et avec eux, souvent (pas contre eux). Le « conflit des genres » n’est pas une nouveauté de la décennie ou du siècle, une nouvelle lubie féminine qui doit ou va s’essouffler. Pour qu’il y ait apaisement, les femmes n’ont pas à « baisser les armes » et à « pardonner » (exit l’amour universel et le pardon christique, s’en est fini de tendre la deuxième joue, il faut non plus des mots mais des actes) : il faut accepter les individus et leurs différences, pas compter le nombre de cases qu’ils cochent dans le sens de la société. Ce n’est pas toujours aux mêmes personnes de donner. Pour qu’il y ait un apaisement, il faut que tous et toutes y mettent du leur, tout simplement. Et il faut que les choses changent.

En conclusion, pourquoi ne pas parler simplement d’énergies et, sur le chemin, éviter un binaire étouffant et non-inclusif, épris de stéréotypes et mal vieilli pour la nuance, le spectre, une notion qui embrasse la puissance de chacun(e), quelque soit son genre ?

Quelques références, en vrac, trouvables très facilement et gratuitement sur internet, pour le plaisir (de tout tons et formes) :

Spectacle Nanette – Hannah Gadsby (en ce moment sur Netflix France)
D’une « théorie du genre » qu’ils font semblant de mal comprendre… de Marie Donzel
Sexe et genre : est-ce la même chose ? – Egalités filles-garçons, Fédération Wallonie-Bruxelles
The genderbread person – itspronouncedmetrosexual
« Genre » : tentative de définition – çafaitgenre.org
Le sexisme, ça se soigne ! de Marie Donzel
« Il n’existe pas 2 sexes (mâle et femelle) mais 48 » par Agnès Giard
La théorie du genre (djendeure) par Insolente Veggie

Que pensez-vous de ces idées ?

Réflexions de sorcière – en sorcellerie aussi, le paraître prône-t-il sur l’être ?

E

Constat amer : nous vivons dans une société du paraître où seules les apparences et le maintient de celles-ci comptent vraiment. On pourrait penser qu’en matière de spiritualité il en est autrement, malheureusement la situation est la même.
Au programme aujourd’hui : « aesthetic witchcraft », « plastic witchcraft », les étiquettes en sorcellerie, l’insécurité en tant que sorcier.ère et les « gourous de la sorcellerie ».

Je sais que mes propos peuvent paraître très « négatifs ». Cependant, la sorcellerie étant en plein essor, il me paraît important de mettre certains points au clair si nous voulons que notre spiritualité en reste une. Bien sûr, cet article ne représente que mes réflexions personnelles – je ne cherche en aucun cas à offenser.

Impossible d’être païen.ne et sorcier.ère sur instagram sans être inondé de publication de « aesthetic witchcraft » aux mille objets produits en masse et filtres iridescents, le tout couronné d’une flopée de hashtags visant à gagner un maximum de likes et followers. (Plus sur ce sujet dans cet article : « Plastic witchcraft et l’idée de norme en sorcellerie ».)
Il existe des influenceur.ceuse.s qui, du haut de leurs 16 ans et 3 trois mois de pratiques sorcières, se mettent à promouvoir des biens matériels douteux et des boxs dédiées en visant un public qui ne sait pas mieux qu’eux ce qu’est la sorcellerie.
Ainsi, on se retrouve face à une vision totalement commerciale et superficielle de la sorcellerie qui – comme tout – peut s’acheter, argent comptant. Ce qui fait le bonheur (à comprendre la richesse) d’individus sans vergognes – qui se souvient du scandale du « witch kit » de Sephora avec ses parfums synthétiques, sauge blanche (le combo magique plastic wichcraft-appropriation culturelle-privilège blanc dans les mains des non-averti.e.s), cristal de quartz rose (la lithothérapie étant environnementalement très problématique si ce n’est même un désastre écologique) et jeux de Tarot ? A croire que le.a sorcier.ère n’est que le.a possédant.e de certains objets, eux sorciers.

La popularité toujours croissante de la sorcellerie entraîne une multiplication de contenus du type « Quel type de sorcier.ère es-tu ? » ou encore « 10,20,30,40,50… types de sorcier.ère.s ».
Dans cette optique le.a jeune pratiquant.e est encouragé.e à « choisir » son étiquette de sorcellerie avant même de débuter à pratiquer. En bref, comme toujours, la forme prime sur le fond. Avec cette conception très limitante de la spiritualité, on s’enferme dans un carcan avant même d’avoir découvert son potentiel, de s’être trouvé.e en tant que sorcier.ère.
Bien sûr que les étiquettes en sorcellerie peuvent être très utiles pour partager avec les autres sorcier.ère.s, toutefois, arriver à mettre des mots sur ses pratiques sacrées – et le souffle des Esprits qui les anime – devrait être une démarche à part entière et non un choix aussi simple et quelconque que de commander à manger.
Cette vision de la sorcellerie est en parfaite adéquation avec la société de consommation. On bride les pratiques, les enferme dans des cadres bien définis, variés en une infinité de nuances curieusement similaires, et acceptables aux yeux de cette dite société : en créant des kits tout prêts – plus qu’à réchauffer – de sorcellerie on s’assure qu’aucune ne sera trop sorcière, vous savez, ce genre de sorcellerie dont on ne parle pas.

Entre syndrome de l’imposteur, sentiment d’invalidité et une tendance à sur-partager, à l’heure des réseaux sociaux il est très simple de se sentir dépassé.e en tant que sorcier.ère dès que l’on aperçois un partage de sorcellerie.
On peut facilement entrer dans un état d’esprit où l’on, sur les réseaux sociaux, cherche avant tout à prouver que l’on pratique activement la sorcellerie, que l’on est valable dans celle-ci. Mais prouver à qui ? A soi-même ? Dans ce cas, pourquoi partager à tout prix ? Aux autres pratiquant.e.s ? Qui, du coup, se sentiront eux-même invalidé.e.s dans leurs statuts de sorcier.ère.s et ainsi de suite.
Ce comportement est flagrant aux périodes de célébrations – notamment aux dates de Sabbats wiccans. On assiste à une véritable course à qui aura l’air de pratiquer le plus, le mieux, à qui aura l’Autel le mieux décoré, les photos de rituel les plus clinquantes, etc. Cela donne franchement l’impression d’assister à une compétition avec prix et honneurs à la clef et non de partager sur un sujet aussi profond et intime que la sorcellerie. Partageons pour nous et pas par pression.
D’où vient cette insécurité dans notre pratique ?

Et que dire des individus qui cherchent à dogmatiser et à imposer leur points de vues et visions de la sorcellerie en se faisant « gourous » sorcier.ère.s ? Le besoin de se sentir supérieur affecte aussi (surtout ?) la spiritualité. Certain.e.s se posent comme référence toute puissante de la sorcellerie. Iels n’hésitent à « remettre à leur place » celleux qui ne partagent pas leur vision des choses ou même qui leur adressent la parole sans les considérer comme des roix.reines sorcier.ère.s. Iels affirment leur point de vue comme vérités totales, souvent dans une optique de profit, et quiconque les remettrais en question en prendra pour son grade.

Je considère qu’en matière de spiritualité nous sommes des maraudeurs sans destination. Nous ne savons pas où nous nous dirigeons mais nous nous élançons sur notre propre chemin – que ce soit une route déjà empruntée ou un passage à se frayer dans les fourrés en luttant contre orties et toiles d’araignées. Cette découverte de l’inconnu – notre inconnu – est ce qui importe. Pas l’image qu’elle nous renvoie.

Merci de m’avoir lue ! Comme toujours, n’hésitez pas à partager avec moi ici ou sur instagram @jusquiame.pindura

Déconstruire ma vision de la menstruation avec le Tarot

E

Voilà un article très approprié au seuil de Beltaine, que des circonstances particulières ont fait naître.

Mardi soir, j’avais passé plusieurs heures plongée dans le blog d’Eaux Cultes (@eaux_cultes sur instagram) – un bonheur absolu.
Avant de me coucher, une de ses story m’a interpellée : il s’agissait d’une réaction à un partage de @helene___huc à propos de la menstruation (une femme pleine de sagesse que je suis heureuse d’avoir découverte). Inspirée par ce partage Iria a précisée que notre vision de la menstruation en tant que rite de purification est en fait purement patriarcale – partant du postulat que le corps de la femme est « impur » et se dois de se purifier mensuellement .
Ayant centré une partie de mon rituel – et en projet plus encore – de menstruation sur la notion de purification, autant dire que je me suis sentie très hébétée – et tant mieux !

Ce post m’a fait beaucoup réfléchir et j’ai entrepris de déconstruire ma vision de la menstruation, malheureusement encore empreinte du patriarcat, en me plongeant dans les tréfonds de mon bien-aimé Tarot de Marseille.

Attention, ce qui suit n’est que le résultat de ma divination – je sais très bien que les règles peuvent être sources d’angoisses et de grandes douleurs et ne nie pas que la précarité menstruelle est un fléau.
Je ne cherche pas à idéaliser la menstruation mais à partager les pistes de réflexions que le Tarot m’a intimé dans le plus grand des respects.

Sans influencer la lecture par un quelconque ouvrage dédié, j’ai laissé les images s’ouvrir à moi et me murmurer leur sagesse…

Les Lames qui m’ont parlé : le Cavalier de Bâton, bien sûr L’Etoile a fait son apparition (elle est pour moi très liée à la notion de menstruation) et enfin l’As de Deniers.


Le Tarot de Marseille de Camoin

Dans le Cavalier de Bâton j’ai aperçue les fameuses chaussures rouges qui m’avaient marqué dans l’excellent « Women who run with the wolves » (de Clarissa Pinkola Estés) : les marques du sang qui s’écoule de l’intérieur de nos cuisses jusqu’à la plante de nos pieds. Cet écoulement n’est en aucun cas vain : il nourrit la Terre que nous foulons.
La menstruation porte en elle un grand potentiel de pouvoir. La vulve et sa matrice est source infinie (voire originelle ?) de magie.
La Jument Blanche, symbole de souveraineté, affirme que notre chair est intrinsèquement pure et tout autant baignée de mystère. Reine qu’Elle est, Elle se dirige et nous montre la voie, celle de la Terre-Mère.
Les interrogations suivantes ont fait surface :
La menstruation est-elle une cosmogonie ? – chaque cycle depuis la nuit des temps serait une recréation de l’origine du monde…
Est-ce une offrande à la Terre ? – un don de soi pour mieux apprécier la valeur inestimable de ce qu’Elle nous offre ?
Serait-ce un appel des Esprits ? – un rappel lancé depuis un jour immémorial à vivre pleinement notre pouvoir ?
Tout à la fois, certainement.

L’Etoile a clairement illuminée la notion de flot, indissociable de celle de menstruation : de nos profondeurs mystérieuses, si semblables au ventre de la Terre et au vide de l’univers, coulent les eaux de la vie.
Cette lame m’a montré la fertilité infinie du sang, qui nourrie sa végétation, aussi cramoisie que lui.
Tel un diapason dans des mains expertes, la menstruation nous accorde à la nature : notre cycle est Son cycle ; Sa danse cosmique, la nôtre.
Le flot de notre sang, ce fil si rouge, nous unis lune après lune à la nature.

La force de notre menstruation est une danse extatique, une ronde débridée : celle de l’As de Deniers.
Un don, offert et reçu, dans toutes les directions.
Un écoulement sans commencement ni fin qui nous ramène à notre origine :
Celle de la Terre.
Celle des Etoiles.
Celle de la vie.

Le Tarot m’a montré que la menstruation n’est absolument pas purificatrice mais une puissance chthonienne, une source souterraine écarlate, un écho sanglant de notre lien à la Terre. Notre corps est de la nature et comme elle, parfait dans ses imperfections.
Comme @helene___huc l’a remarqué : « Le corps de la femme est une technologie de pointe ».

Merci de m’avoir lue ! N’hésitez pas à échanger sur le blog ou mon instagram @pagan.otter.

La Wicca – mythes et réalité

E

La Wicca, bien qu’étant de plus en plus populaire, reste encore entourée de très nombreuses idées reçues et confusions.
Malgré sa présence accrue dans la pop culture et dans les médias, la Wicca reste méconnue – demandez à quelqu’un (non versé.e dans l’occulte et le spirituel) la signification de Wicca et on vous répondra probablement qu’il s’agit d' »une gentille sorcière » – bonjour les clichés !
Certains ouvrages présentent même la Wicca comme « la version plus spirituelle de la sorcellerie », ce qui est absolument faux.
Bien que ne me considérant plus comme wiccane, j’ai énormément lu sur ce sujet et souhaite partager mes réflexions.
J’ai à cœur d’éclaircir quelques idées reçues qui persistent sur la Wicca, notamment par-rapport à sa position vis-à-vis de la sorcellerie.

1 – Mythe : la Wicca n’est pas une religion
Réalité : la Wicca est une religion

On commence par le plus évident : l’aspect religieux de la Wicca.
Dans notre société occidentale, et surtout en France, beaucoup s’effraient en voyant le mot « religion », considérant immédiatement le fanatisme et les dérives sectaires qui pourrait en découler.
Aussi, on a tendance à ne considérer comme religions que les cultes suivis massivement, et très connus, et non les spiritualités « alternatives ». Ainsi, certains ne considère pas la Wicca comme une religion et s’offusquent de voir ce terme associé à leur pratique.
En se référant à la définition du terme « religion » on constate qu’il s’agit d’un « système de pratiques et de croyances en usage dans un groupe ou une communauté » (Wikipédia) – la Wicca est donc, par définition, une religion. Aucun mal à ça.
La Wicca est d’ailleurs reconnue officiellement dans certains pays comme une religion – donc protégée des discriminations par la loi.

2 – Mythe : la Wicca est la continuité de « la religion païenne de la préhistoire »
Réalité : la Wicca est une religion moderne

La religion wiccane s’est en effet crée dans les années 40-50, s’est exportée dans les années 70 – où elle a trouvé un véritable écho dans le mouvement hippie – et s’est forgée telle que nous la connaissons dans les années 90.
Elle est donc très récente.
Bien qu’inspirée du paganisme, elle n’est en aucun cas une reconstruction, et encore moins une continuité, de « la religion de la préhistoire » (ce qu’on peut lire dans certains ouvrages) – à moins d’avoir une machine à remonter le temps, il est totalement impossible de véritablement connaître les pratiques spirituelles du passé (la Wicca est d’ailleurs plus inspirée des sociétés secrètes du XIXème et XXème siècles que du paganisme).

3 – Mythe : les Wiccanes sont des « gentilles » sorcières (ces dernières étant, au contraire, forcément mauvaises)
Réalité : le « Conseil Wiccan » et la « Loi de trois retours »

« Les wiccanes sont des gentilles sorcières. » – qui n’a jamais entendu cette phrase ?
Le Wiccan Rede, traduit par « Conseil Wiccan » est le suivant : « An it harm none do that thou wilt« , une façon archaïque de dire : « Et si cela ne fait aucun mal, fais ce que tu as la volonté de faire ». Difficile de savoir de qui provient ce Conseil, ni de quand, mais clairement Wicca et éthique vont maintenant de paire.
Comme son titre l’indique, le Wiccan Rede est un conseil et non une règle absolue à suivre à la lettre sinon -insérer conséquence catastrophique-.
En lisant Gerald Brousseau Gardner, considéré comme le père fondateur de la Wicca, j’ai compris que l’accent sur l’éthique a permis de protéger la toute jeune religion de l’intolérance religieuse et des préjugés, notamment liés au satanisme. Et oui, dans les années 50,60,70 la sorcellerie était, pour beaucoup, pensée comme un culte de satan.
C’est d’ailleurs pour cela que la Wicca (de l’anglo-saxon « homme sage » – le « sage » de sagesse) s’appelle ainsi et non juste « Witchcraft« .
La « Loi de trois retours » : arrivée plus tardivement dans la Wicca (probablement dans les années 90) cette « loi » – il n’est plus question de conseiller mais de dogmatiser – a érigé l’éthique en véritable absolutisme dans la religion wiccane, désormais bien établie.
Cela a été, et est toujours, le sujet de bien des débats houleux entre wiccan.e.s et sorcier.ère.s. La sorcellerie dite moderne et sa pratique en est encore très imprégnée. Dites-vous « curse-friendly » et une flopée de pratiquant.e.s (de toutes horizons spirituelles) choqué.e.s vont vous sortir le fameux « cela te reviendra en pire ! ».
Cela retient nombre de pratiquant.e.s d’explorer leur sorcellerie – n’oublions pas, la magie dite « négative » est tout aussi légitime que la magie considérée comme « positive ».

4 – Mythe : toutes les pratiquantes de la Wicca sont des femmes
Réalité : les genres et la Wicca

Il s’agit d’un malentendu qui touche aussi la sorcellerie, voire l’occulte en général.
Il est bien sûr évidement que tout le monde peut pratiquer la sorcellerie et/ou être wiccan.e. Pourtant celle-ci est encore considérée comme « féminine » dans l’imaginaire collectif – d’où l’image type de la sorcière moderne : une femme à la longue chevelure flottante, entourée de plantes, radieuse au clair de lune, murmurant quelque incantation poétique…
De base (et en situation de groupe) la Wicca est constituée par autant de femmes que d’hommes car centrée sur la notion de polarité : chaque pratiquante travaille avec un pratiquant et inversement. Alors les « énergies féminines et masculines » sont équilibrées, une situation jugée propice à la magie. C’est pourquoi des covens recherchaient en particuliers des couples. Cette notion pouvait être très poussée : dans certains rites seule une femme pouvait tenir le bout de la corde d’un homme, son partenaire de pratique, et inversement.
Cette idée, très essentialiste (et donc oppressive), a été justement de plus en plus remise en question ces dernières décennies. Ainsi, il existe maintenant des covens constitués entièrement de femmes, d’hommes ou mixtes et non soumis à l’idée de « polarité de genres ».

5 – Mythe : les sorcier.ère.s sont tous.te.s Wiccan.e.s
Réalité : la confusion Wicca-sorcellerie

Bien que la majorité des wiccan.e.s se considère sorcier.ère.s, l’inverse n’est pas vrai. Toute sorcellerie n’est pas que wiccane, c’est à dire que toute pratique de sorcellerie n’est pas obligatoirement inscrite dans le contexte religieux de la Wicca. Il existe donc des sorcier.ère.s qui n’adhèrent pas à la Wicca et pratiquent leurs sorcelleries avec leurs spiritualités qui leurs sont propres.
Toutefois, et bien malencontreusement, de nombreux livres relayent cette confusion, souvent en axant leur propos sur la sorcellerie sans préciser qu’il s’agit là de sorcellerie wiccane – le.a jeune pratiquant.e ne fera donc pas la différence entre sorcellerie et Wicca.
De par ce mélange, de nombreux.se.s sorcier.ère.s débutent wiccan.e.s avant d’explorer d’autres voies et ainsi se forger leurs propres spiritualités.

6 – Mythe : la Wicca est une religion libre, sans format pré-défini
Réalité : Wicca et hiérarchie, l’évolution de la Wicca

Etant inspirée par les sociétés secrètes, très en vogue au XIX-XXème siècles (comme la Franc-maçonnerie), la Wicca est, à l’origine, constituée de rituels établis, d’un Livre des Ombres type et de grades et de niveaux : tout d’abord il y a la Grande Prêtresse et le Grande Prêtre (qui traditionnellement n’est que l’aide de la Prêtresse et non son égal) puis il existe trois niveaux, chacun accompagné de son rituel d’initiation.
Il existe aussi le titre d’Ancien.ne.s, décerné aux membres du Coven qui y sont depuis plusieurs années et ont acquis les niveaux – ceux-ci peuvent former un conseil afin de débattre des choix à prendre au sein du groupe.
De plus le titre de la Demoiselle « Maiden« , peut-être décerné à la plus jeune femme du groupe. Celle-ci incarnera la toute jeune Déesse lors du rituel du Sabbat d’Imbolc, par exemple.
Bien sûr, ces niveaux et titres ne sont pas une norme absolue, chaque Coven et pratiquant.e solitaire est libre de s’adapter. Ainsi de nombreux groupes ont cessés de hiérarchiser leurs membres ou font tourner le titre de Prêtre.sse entre eux.
Mais cette liberté peut porter à confusion : dans les années 90, en particulier, la Wicca à tant évoluée qu’elle en est devenue méconnaissable aux pratiquant.e.s traditionnel.le.s (qui distinguent cette forme de leur religion en l’appelant « neo-Wicca »). Ceux-ci s’inquiètent que la Wicca ai perdue son identité propre en tant que religion. Au fil des années ce phénomène ne fait que s’amplifier.
Ces derniers temps la Wicca connaît une véritable explosion (notamment de par la popularité de celle-ci sur les réseaux sociaux) et de très nombreux livres à son sujet son publiés mois après mois – dont beaucoup font perdurer la confusion Wicca-sorcellerie.
Son évolution rapide et la tournure qu’elle prend – la Wicca est sans conteste la branche de spiritualité la plus affectée par le phénomène « Plastic Witchcraft » – inquiète de nombreux.ses pratiquant.e.s qui souhaitent revenir au format originel de celle-ci. Au contraire, d’autres argumentent qu’une religion qui n’évolue pas est une religion condamnée à disparaître.

Quoi qu’il en soit, la Wicca est une religion très liée à la sorcellerie, qui gagne de plus en plus de reconnaissance et tend à se populariser davantage dans les années à venir.

Si la Wicca vous intéresse, je vous recommande de lire des ouvrages de Gerald B. Gardner, de Doreen Valiente et de Janet et Stewart Farrar.

Voilà qui conclu cet article déjà long ! En espérant avoir éclairci quelques confusions. J’ai essayée d’être la plus complète possible par rapport aux thèmes que j’ai abordés (il existe des dizaines d’autres rien que sur la Wicca), n’hésitez pas si vous avez des questions – je tacherais d’y répondre.

TAG – Ma sorcellerie c’est…

E

Je vous propose aujourd’hui de participer au tag dont j’ai eu l’idée, intitulé « Ma sorcellerie c’est… ».
Ma démarche est la suivante : en observant les tags sorciers j’en ai trouvé de nombreux axés sur les objets utilisés dans la pratique (que ce soit livres, outils, herbes, etc) où écrits d’un point de vue de consommation (quel sabbat préféré par exemple). C’est pourquoi j’ai souhaité en créer un sur la sorcellerie en elle-même. L’objectif de ce tag est de mettre en avant sa pratique sorcière dans sa sagesse et ce qu’elle a d’unique et d’authentique, plutôt que sur la matérialité qui peut l’entourer.

Celui-ci n’est pas proposé sous la forme familière de questions, que je juge trop contraignantes, mais de manière libre. J’y ai répondu sous la forme d’une liste, libre à vous d’en faire un texte en prose, un poème et même d’y participer sous une forme non littéraire !

TAG – Ma sorcellerie c’est…

– les phosphènes qui dansent sous mes paupières
– m’extasier sur la beauté de la nature, toujours
– entrer en transe et ressentir mon esprit s’envoler
– mes paumes appuyées sur la haute pierre de la forêt
– le magnétisme de la Lune qui me fascine
– le flot de la rivière qui me régénère et m’apporte la guérison
– saluer cet arbre ancien
– découvrir qu’une offrande a été acceptée
– verser des libations pour honorer Ancêtres et Esprits
– les battements de la Terre-Mère qui inspirent ceux de mon cœur
– réaliser notre état d’interconnexion sur la Grande Tapisserie
– les symboles lourds de sens que j’aperçois dans des brindilles
– la sensation de l’écorce de ma Branche d’Argent dans ma main lorsque j’appelle des Esprits de la nature
– interpréter mes rêves, boire les conseils et augures dont ils regorgent
– la sérénité et le sentiment d’accomplissement que je ressens après un rituel
– me faire le canal du sacré dans ma créativité
– prier et me savoir entendue.

Je tag ma soeurcière @ephemere_2 et @de.brume.et.de.seve ! N’hésitez pas à y répondre et à me taguer sur instagram (@pagan.otter), merci beaucoup !

Réflexions de sorcière – « plastic witchcraft » et l’idée de « norme » en sorcellerie

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Le reflet de ma spiritualité.

Article inspiré par une publication de @de.brume.et.de.sève sur instagram, une sorcière qui a tout mon respect et mon admiration.

Cette période de confinement m’aura confirmé ceci : pas besoin d’une myriade d’outils et de ritualisation grandiloquente pour être un.e sorcier.ère.
Évident, non ?

Et pourtant, en ouvrant n’importe lequel des ouvrages dédiés que j’ai pu lire mes premières années de pratique assumée, ça ne l’est absolument pas. Il n’est question que d’obtenir encore et encore : pas d’accomplissements spirituels mais des pierres et cristaux, des herbes, de l’encens, des « outils indispensables » – toujours plus…
Où est le sacré dans tout ça ?
A croire qu’il est impensable de jeter un sort sans le trio encens-bougie-cristal correspondant. Société de consommation et spiritualité – une alliance contradictoire ? Ce phénomène a un nom : le « plastic witchcraft », une mode dangereuse pour certains, un titre offensant pour d’autres qui affirment leur surconsommation en matière de spiritualité.
Dans un culte de la nature, multiplier les actes nocifs envers celle-ci n’a clairement pas de sens. Bien évidemment, chacun.e est libre de faire ce qu’il.elle souhaite. Mais comment honorer la Terre-Mère avec des pierres arrachées de ses entrailles à l’autre bout du monde ? Avec un « outil indispensable » fabriqué sur un autre continent par des ouvrier.ères aux conditions de travail déplorables ?
Il est désolant que la sorcellerie, telle qu’elle est popularisée aujourd’hui, soit aussi axée sur le matérialisme. Aucun objet ne remplacera jamais dans un rituel volonté, intention et concentration.

Un autre problème majeur de la sorcellerie actuelle est la normalisation des pratiques : toutes pratiques considérées comme « déviantes », « dangereuses », « inacceptables » (autant dire ce qui n’est pas arc-en-ciel et paillettes ou encore sort-pour-obtenir-quelque-chose-d’inutile) sont méprisées et systématiquement « combattues » à coup de propos culpabilisants et hautains. Dès qu’il est question de mettre les mains dans la boue, plus personne.
Il en est tristement de même envers des pratiques traditionnelles (de minorités ethniques ou non) – en train de disparaître qui plus est.
Désormais la figure du.de la sorcier.ère doit être bien proprette et surtout ne pas être menaçante. Jeter des sorts à tout va en reniant toute pratique un tant soit peu agressive. En bref : être inoffensive et ultra positive.
Cette norme de sorcellerie « acceptable » aseptisée et tournée vers le profit et le gain matériel détruit la sorcellerie même. En réduisant les pratiques sorcières à une norme on bride totalement les sorcier.ères en les enfermant dans ce qui est considéré comme de la sorcellerie « correcte ». On fini par reproduire le même schéma que les religions orthodoxes (que certain.es fuient dans la sorcellerie) : une seule façon de faire et c’est tout. Où est la créativité dans tout ça ? Et l’authenticité ?

Vient la situation des « Aesthetic witches » où la spiritualité devient une image de surface bien jolie avec ses accessoires savamment disposés sur une publication instagram aux filtres à paillettes et hashtags racoleurs. Evidemment, il est tout à fait possible d’avoir un ensemble de pratiques spirituelles authentiques tout en se considèrant comme un.e « aesthetic witch ». Aucun mal à avoir un beau feed mais lorsque vouloir des « points sorcier.ères » devient plus important que de vivre réellement sa spiritualité, un vrai problème apparaît. Pour certain.es, flatter son ego en se mettant en avant en tant que sorcier.ère devient plus important, et même préférable, au travail spirituel profond.
Ainsi, nombre de pratiquant.es ne se reconnaissent plus dans la sorcellerie actuelle, réduite à une mode où le paraître et l’avoir prônent sur l’être, et décident de ne plus s’identifier en tant que sorcier.ère – ce qui est bien dommage.

Chaque individu sorcier.ère a une pratique qui lui est propre, sa propre spiritualité individuelle – liée à son vécu, ses ancêtres, ses Esprits locaux de la nature, ses entités, en soit une infinité de facteurs personnels.
Plutôt que de forcer des normes sur les autres pratiquant.es (des individus si proche de nous !) émerveillons-nous de leurs sorcelleries, si riches de sagesse et authentiquement eux.elles.

Je vous en prie, lorsque le confinement sera levé, ne nous jetons pas sur la surconsommation et réévaluons nos besoins.

Merci de m’avoir lue ! Souhaitez-vous que j’aborde certains thèmes en particulier ?

Paganisme – rituel d’Imbolc-Oímelc

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A l’occasion du festival d’Imbolc-Oímelc, je vous partage le rituel que j’ai réalisé plus tôt dans la journée.

Petit rappel : Imbolc, l’un des quatre Festivals de Feu Celte, célèbre le retour tangible de la lumière après des semaines d’hiver et les premiers signes du printemps. Il est dédié à la Déesse Pan-Celtique Bríg, très connue sont le nom de Brighid en Irlande (prononcé « bridje »), la plupart des traditions de ce festival originant de cette île. Elle est nommée Brigindu ou Brigindo et Briga en Gaule – c’est par ce dernier nom que je la nomme dans ma pratique. Son nom signifierait « l’Exaltée » ou/et « la Très Haute » (et non « flèche flamboyante » comme il a été cru).
Le festival est célébré le premier février (et non le deux comme on peut le lire souvent dans des ouvrages païens), les festivités débutants la veille.
L’étymologie du mot « imbolc » souvent traduit par « dans le ventre de la mère » étant floue, je préfère nommer cette célébration Oímelc (« oí » signifiant lait et « melg » mouton), ce nom, alternatif étant malheureusement très peu utilisé dans la communauté païenne.

« Candlemass », soit la messe des bougies, est la version chrétienne catholique de ce festival – l’Eglise ne pouvant effacer les célébrations païennes – célébrée le deux février. Elle commémore la fin de la période rituelle de quarante jours de purification de la Vierge suivant la naissance du Christ, une coutume toujours observée de nos jours dans l’Islam.

Après ces quelques notes, voici le rituel(que vous êtes évidement libre d’adapter à votre pratique personnelle) :

Oímelc

Objectifs du rituel : reconnaître que l’hiver touche à sa fin, honorer Briga et demander sa bénédiction

Matériel : une bougie rouge, libation, Crosóg Brighde (croix de Bríg – il existe de nombreux tutoriels en ligne pour en confectionner), Brideog (poupée représentant la Déesse), Leaba Bhrigid (un petit lit sur lequel coucher votre poupée), Slat Geal (baguette symbolisant la fertilité).

Débutez le rituel comme vous le faite habituellement dans votre pratique : en prenant un bain, en méditant, en brûlant de l’encens, en appelant des éléments, des guides, vos Ancêtres, en traçant en Cercle, etc. Je recommande d’au moins purifier votre espace de pratique et vos outils – pour cela j’emploie une branche de gui, le « balais de foudre » – puis bénir le lieu du rituel.
Ensuite :
– allumer la bougie rouge
(optionnel : je fais tinter ma Branche d’Argent (une branche avec des clochettes) avant toute invocation, cet outil permet d’atteindre l’Autre Monde)
– invoquer :

La couleuvre s’éveille
Perce-neiges et crocus sortent de la Terre
Les agneaux s’apprêtent à naître
Le lait de la brebis coule
La nature s’éveille, j’accueille ce renouveau.
Briga l’Exaltée soit la bienvenue en ce jour qui t’es dédié :
Offre ta bénédiction à ce foyer !

– placer la Brideog dans le Leaba Bhrigid et le Slat Geal au-dessus

Briga de la forge, soit la bienvenue :
Que tes flammes me transforment !
Briga la guérisseuse du puits, soit la bienvenue :
Que ton ample manteau vert m’apporte la santé !
Briga la poétesse, soit la bienvenue :
Que ton inspiration divine m’illumine sur la voie du bardisme !
J’ai tressé cette Crosóg en ton honneur,
Que ta Roue Solaire nous protège !
Briga accepte cette libation, je t’honore !

– réaliser une libation, j’ai pour ma part utilisé du vin rouge mais de la bière, du whisky ou encore du lait (animal ou végétal) seraient tout à fait appropriés
– remercier et honorer la Déesse – ce que je fait avec mon bodhrán (tambours Irlandais)
– éteindre la bougie

Terminez le rituel comme vous le souhaitez, en faisant monter l’énergie, en dissipant votre Cercle si vous en avez tracé, etc ; n’oubliez pas de vous ancrer.
Je vous recommande d’accrocher votre Crosóg Brighde, symbole protégeant des incendies et des intempéries le foyer, au-dessus de votre porte d’entrée.

Merci de m’avoir lu, n’hésitez pas à commenter cet article !
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